17 septembre 2019

Alain Prost – Le Professeur de gestion – Les revenants 4⁸

 

Vingt ans après sa retraite définitive, en 2013, le  palmarès d’Alain Prost ( 51 victoires) n’avait été dépassé que par celui de Michael Schumacher (91 victoires) . Depuis, Sebastian Vettel avec 52 succès et Lewis Hamilton avec 81, l’ont rejoint et doublé.

Alain Prost a néanmoins quitté une première fois la F1, à son corps défendant, en 1991. Inutile de préciser qu’il n’avait pas l’intention de prendre sa retraite. Il s’est donc retrouvé en congé sabbatique pendant une année environ. Itinéraire.

Olivier Rogar

 

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Les statistiques d’Alain Prost

https://www.statsf1.com/fr/alain-prost.aspx

 

McLaren avec Prost – Watson…

Alain Prost

Alain Prost – McLaren M29 1979 @ DR

Talent, intelligence, caractère. Electricité palpable. D’un côté la réputation d’un métronome, «  le professeur » et de l’autre celle d’un éternel insatisfait, politique, voire manipulateur. Relations souvent tendues avec ses équipiers et ses chefs d’écurie. Alain Prost est doté d’une nature qui se refuse tellement à l’échec qu’elle semble ne pouvoir en endosser la moindre parcelle de responsabilité. Gestion difficile pour ses employeurs ou partenaires. D’autant que le talent dont il est porteur place l’échec à des niveaux très relatifs, de quoi constituer un palmarès satisfaisant pour nombre de pilotes.

…puis Renault avec Prost – Arnoux

Alain Prost

Alain Prost – Renault RE30 1981 @ DR

Alain Prost débute chez McLaren en 1980, chamboule le « vieux » Watson, puis casse son contrat pour passer chez Renault. Procès McLaren / Renault.  – Penser à être ou avoir un bon juriste quand vous posez vos pieds en F1 -.  Il commence à gagner des Grands Prix et à perdre des championnats. On se rappelle des bagarres mal vécues avec René Arnoux et des tentions avec Gérard Larousse. En septembre 1983, il signe finalement avec Renault pour une nouvelle saison. Mais les ruptures de turbo à répétition, la tension qui règne dans l’équipe et le titre manqué in extremis, nous valent l’épisode « Renault : une équipe vire son pilote ». Divorce par consentement mutuel dirait – on en termes plus « diplomatiques » [1].  9 victoires avec Renault.

Encore McLaren. Mais avec Lauda.

Niki Lauda - Alain Prost 1984

Alain Prost – McLaren MP4 2 1984 @ DR

Alain Prost se fait ensuite récupérer par McLaren. La cohabitation avec Niki Lauda se passe bien, le futur « professeur » se fait battre en 1984 par « l’ordinateur » et l’emporte à son tour en 1985 puis en 1986. Lauda s’étant retiré, Rosberg puis Johansson se succèdent sans problèmes à ses côtés. Comme quoi…

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Puis Senna !

Alain Prost - McLaren MP4 4 1988

Alain Prost – McLaren MP4 4 1988 @ DR

Mais l’ouragan arrive en 1987 avec Ayrton Senna. Doué, ultra rapide, travailleur, perfectionniste, orgueilleux. Une sorte de Prost. Dans la même équipe. Ce qui devait arriver, arriva. Après une première saison « normale » qui vit triompher Senna au championnat, la cohabitation entre les deux pilotes devient ingérable, même pour le rusé Ron Dennis. Prost annonce son départ dès l’été 1989. L’accrochage entre Senna et lui au Grand Prix du Japon rompt leur éventuel dernier lien. Senna gagne la course mais est déclassé. Appel rejeté par la Fisa. Alain Prost remporte le championnat du monde. [2]

Chez McLaren son palmarès s’est enrichi de 3 titres de Champion du Monde, 1985, 1986 et 1989 et de …30 victoires !

Ferrari avec Prost-Mansell puis -Alesi…

Alain Prost - Nigel Mansell

Alain Prost – Ferrari 641 1990 @ DR

Alain Prost se réfugie chez Ferrari pour 1990. La saison 89 de la Scuderia a été difficile malgré une troisième place au championnat du monde. Mansell a gagné deux fois et  Berger  une fois.

Nigel Mansell devient son nouvel équipier. Complètement déstabilisé par la manière dont Prost s’arroge l’attention quasi exclusive de l’équipe, le malheureux Mansell gamberge, frôle la paranoïa aigüe et ne songe plus qu’à évoquer sa retraite.

Mais il s’accroche, notamment avec son équipier ; il remporte le Grand Prix du Portugal après avoir failli mettre Prost dans le muret des stands, grâce à un départ complètement en diagonale. [3] Prost finit troisième derrière Senna qui boit du « little milk » comme aurait dit Balestre.    Pourtant  on peut dire qu’Alain Prost a fédéré son équipe, il a construit, avec la détermination qu’on lui connait. En fin de saison, malgré 5 victoires il est second au championnat derrière Senna qui le devance de 7 points. Non, ceux perdus à Estoril n’auraient pas suffi.

Exit Prost 

On ne peut oublier la manière dont s’est déroulé l’avant dernier Grand Prix de la saison au Japon, à Suzuka.   Senna, (on le saura plus tard) a volontairement  éperonné Prost au premier virage après le départ. Double abandon. Et grand scandale.  Prost songe à se retirer.

Mais Il repart avec la Scuderia pour 1991. La Ferrari 642 n’a rien d’une réussite. Cinq podium, aucune victoire. Lui et un jeune Alesi, qu’il prend de manière inattendue sous son aile, s’épuisent à faire rouler cet engin.

A un point tel qu’en fin de saison, après le Grand Prix du Japon 1991, Alain Prost confie à des journalistes que sa Ferrari est un camion… Lorsqu’Ettore Bugatti avait comparé les Bentley à des camions, c’était assez bien passé chez… Bugatti. Prost a-t-il à l’esprit cette référence historique ? On peut en douter. Toujours est – il que, malgré son contrat 1992 avec la Scuderia, il est limogé avant le dernier Grand Prix…[4]

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5 victoires avec Ferrari.

Année sabbatique

A ce stade qui constitue la première phase de sa carrière F1, Alain Prost a déjà le plus beau palmarès de l’avant Schumacher. 3 titres de champion du monde, 44 victoires, 20 pôles positions et 35 meilleurs tours sur 183 Grands Prix disputés.

Alain Prost - Ligier

Alain Prost – Ligier JS37 1992 @ DR

Mais il est trop tard pour négocier un transfert. L’idée de s’investir dans une écurie, pas seulement comme pilote, mais comme actionnaire ou dirigeant, le taraude. Des discussions sont en cours. Elles vont assez loin. On le verra longuement essayer la Ligier JS 37 à moteur Renault sur le Paul Ricard. Pas sûr que Renault ait tout fait à l’époque pour que le projet se réalise.

Il renonce et prend véritablement une année de congés. Congés mis à profit pour négocier sa saison 1993 avec Williams-Renault. Parceque c’est l’écurie en grande forme de cette période et parcequ’elle lui donne la possibilité de vaincre le signe indien qui l’avait empêché d’être champion avec Renault, dix ans auparavant.

Williams avec Prost et Hill

Damon Hill - Alain Prost

Alain Prost – Williams-Renault FW15C 1993 @ DR

Il n’est pas le seul à effectuer cette démarche. Son alter-ego Ayrton Senna n’est pas ravi de la perte du moteur Honda par McLaren fin 1992. Approche directe. Il semble néanmoins que Prost soit mieux placé. Et refuse d’avoir Senna comme équipier. Pendant ce temps, Mansell fait une extraordinaire saison. Il est titré dès le Grand Prix de Hongrie.

Sans prendre la mesure de sa réelle position auprès de l’intransigeant Franck Williams, il fait monter les enchères pour 1993. Pas longtemps. Pourparlers rompus. Engagement d’Alain Prost.  Nigel Mansell ira vivre une autre histoire en Indy – Cart.

Alain Prost et Damon Hill, disposent de la formidable FW15 équipée d’une boîte semi-automatique, d’un contrôle de traction et de suspensions actives.  Un certain Adrian Newey a présidé à sa conception.

Le quatrième titre d’Alain Prost

Alain Prost

Alain Prost – Champion 1993 @ DR

L’ambiance n’est pas sereine, malgré une victoire initiale, il se retrouve devancé de cinq point au championnat après Monaco. Par Senna. Resté chez McLaren désormais, plus modestement, motorisé par Ford. La tendance s’inverse. Mais Senna avec cinq victoires,  Hill avec trois et Schumacher qui a signé son premier succès…ont rendu la chevauchée de Prost moins héroïque que celle de Mansell (9 victoires) un an auparavant.

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Au terme de la première séance d’essai du Grand Prix du Portugal, à Estoril, Prost annonce sa retraite. En finissant second  le dimanche suivant, il remporte son quatrième titre.

 Ce retour d’une seule saison lui aura donc valu un titre, 7 victoires, 13 pôles positions et 6 records du tour.

Malgré différents projets de retour, sollicités par McLaren notamment dont il est le consultant, l’heure de la retraite sportive a sonné. Il a 38 ans, 4 titres, 51 victoires. Un palmarès qui restera inégalé jusqu’à Michael Schumacher.

 

Notes

[1]  Au cours du championnat 1983, Renault avait publié une publicité intitulée « Renault : Une équipe derrière son pilote » mais compte tenu de la tournure des évènements, un journal ou hebdo automobile avait rebaptisé la pub : «  Renault : Une équipe vire son pilote ».

[2]  Lors du dernier Grand Prix en Australie à Adélaïde, le départ est donné sous le déluge. Prost s’arrête au terme du premier tour alors que la course est stoppée au drapeau rouge. Et même l’insistance « soutenue » (on imagine) de Bernie Ecclestone pour qu’il reparte lors du second départ n’y fera rien. Rappelant en celà le précedant de Niki Lauda en 1976.

[3]  Au risque de me faire tancer, je dirais que ce style de départ a du inspirer Michael Schumacher.

[4]  Nous reprenons ici l’extrait d’une note de Marc Limacher pour « Sportune » au sujet de l’aspect financier de la carrière d’Alain Prost à partir de 1990. Sujet délicat que nous abordons hors de notre note car difficile sinon impossible à vérifier.

Mr Limacher explique : « … Ayant signé un contrat de 36 millions de dollars sur la période 1990-1992 avec Ferrari, Prost devait même devenir Team Manager en 1992, comme l’indique son contrat d’alors. Sans volant forcé en 1992, le champion français touche son salaire Ferrari pour l’année, à savoir 12 millions de dollars. Mais, l’envie de courir est trop forte et des essais pour le compte de l’équipe Ligier, afin de créer un binôme 100% français, commence à voir le jour. Toutefois, ce n’est pas du goût de l’équipe McLaren qui propose un contrat à Prost de 4 millions de dollars…pour ne pas courir en 1992 ! »

Quelques temps plus tard, Alain Prost signera avec Williams pour 1993 avec un contrat de deux ans. Il n’en fera qu’un seul et touchera 50% de son salaire en 1994 (8 millions de dollars). Retraite oblige. Pour finir, Prost aura touché entre 1992 et 1994 un total de 36 millions de dollars. Une situation qui a suscité une réflexion d’Ayrton Senna à son agent (alors le même que celui de Prost), Julian Jakobi : « Il n’a couru qu’une année sur trois. Si tu me trouves un plan du même genre, je signe tout de suite ! ».

 

 

 

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