En cette fin novembre 1977, Niki Lauda vient de conclure au Japon un deuxième championnat du monde victorieux. Il était impensable qu’une de ses autos ne fût pas montrée au Jochen Rindt Show à Essen, même si Niki, fort de sa notoriété qu’il ne transformera jamais en popularité, a monté son propre show concurrent à Vienne (« beer-tent festival », selon l’historien Eric Walish). Nina Rindt a repris l’organisation du show de son époux.
Quelques années après la mort de cet Autrichien au visage de boxeur, qui curieusement lui rappelle celui de son premier amour, un grand pilote lui aussi, la longue dame en noir, ex-égérie de Saint-Germain-des-Près, la muse de l’existentialisme, est en tournée en Allemagne. Sa carrière est désormais tournée vers l’étranger où elle incarne encore la tumultueuse époque des caves enfumées du Quartier latin, la liberté d’une jeunesse ivre de l’après-guerre, que la tornade révolutionnaire de Mai-68 a définitivement balayées.
Les deux jolies mômes se connaissaient-elles ? Gréco est pilotée par Nina Rindt au Salon, une Gréco grave et intériorisée qui pose sur le flanc de la 312. Lui revient-elle l’annonce ésotérique de la mort de Jean-Pierre Wimille dans la nuit précédant ce 28 janvier 1949 à Buenos Aires ? La paire de gants de pécari avec lesquels il avait gagné une course tombe d’une l’étagère et brûle sur l’ampoule de la lampe de chevet qu’elle garde allumée quand elle dort.
Juliette chante en cette année 1977 « L’amour trompe la mort ».Nul ne sait, et encore moins les photographes agglutinés devant les deux icônes, l’égérie du Swinging London et la muse de Sartre, de Gainsbourg, le lien extrême qui unit Gréco et Jean-Pierre Wimille. Elle ne le rendra public que cinq ans plus tard lors de la parution de son autobiographie, « Jujube ».Je vis avec la douleur de sa disparition bien cachée au fond de moi, écrit-elle.
Une douleur ineffaçable que Nina Rindt porte depuis 50 ans, transcendée par l’amour qui trompe la mort. Une douleur qui la privera d’acquiescer à un projet de biographie dessinée que lui avait soumis Marc Ostermann.Rendez-vous dans dix ans ?
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