F1 2015 : Le billet de Johnny Rives – Mexique 17
PAS UN CADEAU !
Lorsque le grand cirque de la F1 débarqua à Mexico en provenance directe du Texas, Lewis Hamilton était aux anges. Son troisième sacre de champion du monde était tout chaud. Il faisait de lui l’égal de quelques héros les plus fameux dans l’histoire des Grands Prix, comme Jackie Stewart ou Niki Lauda. Pour ne rien dire d’Ayrton Senna, son idole d’enfance ! Il avait le cœur léger, Hamilton… Et c’est bien le cœur léger – voire légèrement acidulé – qu’il avait lâché quelques petites phrases peu amènes à propos de son malheureux équipier Nico Rosberg. L’épisode de leur contact musclé peu après le départ à Austin ? Il ne se sentait pas concerné. Prêter main forte à Rosberg pour l’aider à conquérir la deuxième place du championnat ? Un haussement d’épaules ! Des cadeaux, Hamilton en fait sans doute autour de lui. Mais à Rosberg, n’y songeons même pas !
Johnny Rives
Cette indifférence à son endroit alourdissait encore le pesant fardeau que Rosberg trimbalait depuis le Texas. Tout contrit, il avait d’ailleurs reconnu que ce Grand Prix des Etats-Unis c’est lui qui l’avait perdu bien plus qu’Hamilton ne l’avait conquis. Autant de constatations permettant de mieux apprécier encore la brillante manière avec laquelle, sur le probant et spectaculaire circuit de Mexico, Nico s’est racheté.
Décrochant la pole après avoir dominé les essais libres avec constance, il a réussi en course à démontrer son aptitude à reprendre le contrôle d’une situation que l’on croyait compromise. Contrairement à l’image qu’il avait donnée au Texas, il est apparu cette fois habité par une volonté inflexible : celle de damer le pion à son redoutable partenaire. Confirmant les intentions d’Hamilton, ce fut loin d’être un cadeau ! Joli rachat. Et avec la manière, SVP : pole, victoire et meilleur tour…
PAS UNE ERREUR. – Les épisodes n’ont pas manqué au cours de ce G.P. du Mexique où l’on a guetté d’éventuelles marques de faiblesse chez Rosberg. D’abord le départ. Le freinage de la meute à quelque 300 km/h à l’approche du premier virage pouvait être redoutable. Il était redouté. Concernant Rosberg deux fautes le guettaient : prendre trop de précautions et freiner trop tôt, ce dont ne manquerait pas de profiter Hamilton. Ou, à l’inverse, freiner trop tard et accomplir un crochet au large, laissant largement ouvert le passage à son rival. Mais rien de cela. Rosberg s’assura d’entrée le premier fauteuil avec une belle autorité. Après quoi vinrent les changements de pneus. Et leur part d’incertitude. Mais les deux fois Nico reprit la piste avec autorité sans rien perdre sur Hamilton. Enfin il y eut l’intervention de la voiture de sécurité (SC). Au Texas, il avait impeccablement réussi ses remises en route. A Mexico, Hamilton ne manqua pas, tel le loup affamé, de venir renifler ses mollets à l’approche du « restart ». Ce fut insuffisant pour troubler Nico. Qui acheva la distance sans autre émotion qu’un écart sans conséquence sur un bas coté – juste avant que Lewis n’en fasse autant !
LES FERRARI KO.- Sebastian Vettel n’a pas eu de réussite après le trait d’humour qu’il avait tenté (sans succès) envers ses rivaux de Mercedes : c’est lui qui a été victime de la première bousculade – sans que l’on puisse reprocher quoique ce soit à Ricciardo dont la Red Bull perdit des petits morceaux d’aileron dans l’affaire. La crevaison qui en résultat pour l’Allemand lui valut dès le premier tour un retard de 50 secondes sur les Mercedes. Retard qu’il réussit à maintenir pendant une quinzaine de tours – preuve qu’il roulait aussi vite qu’elles. Jusqu’à ce qu’un tête-à-queue réduise ses espoirs… Lesquels furent définitivement anéantis une trentaine de tours plus tard. Par une sortie plus brutale dans la même courbe… qui pourrait être baptisée de son nom ! Mais cela ne se fait plus. Les ordinateurs préfèrent que l’on numérote les virages.
Quant à Raïkkonen il n’a pas eu plus de chance. Remonté de la 19e à la 6e place, il a été victime, comme l’on se retrouve, d’un nouvel accrochage avec son compatriote Vallteri Bottas. Mais cette fois, ils avaient intervertis leurs rôles ! Résultante du KO des Ferrari : les dix premières places furent partagées au plan des moteurs entre Mercedes (7, dont le podium entièrement) et Renault (3, malgré l’absence, encore, de cette fameuse nouvelle version que l’on nous fait languir).
HERMANOS RODRIGUEZ.- Le circuit de Mexico porte le nom des frères Ricardo et Pedro Rodriguez, les deux pilotes mexicains les plus fameux de l’histoire de la course. Leur saga avait débuté au Mans à la fin des années 1950. L’engagement de Ricardo ayant été refusé pour cause de trop jeune âge (il avait 17 ans) Pedro y débuta en équipe avec le Français José Behra (frère de Jean) avant de constituer avec son frère un des équipages les plus populaires des 24 Heures à cette période. Ricardo fut le premier des deux à accéder à la F1, comme pilote officiel de Ferrari en 1962. Mais c’est au volant d’une Lotus qu’il trouva la mort la même année sur le circuit qui porte aujourd’hui son nom. Pedro ne fut fameux qu’une dizaine d’années après lui, notamment pour avoir été un des plus formidables pilotes des fabuleuses Porsche 917 en endurance. Il trouva la mort sur le Norisring en 1971 sur une Ferrari 512 d’emprunt dans une course secondaire.
Sergio Perez est aujourd’hui leur successeur dans le cœur des Mexicains. Mais, quelle que soit la qualité de sa Force India, il n’a pas la chance de disposer d’une F1 de pointe capable de rivaliser avec les Mercedes ou les Ferrari.
Illustrations©DR
Merci Johnny Rive !
pour cette belle, encore et…super belle analyse de la course de Mexico City, ainsi que l’analyse psychologique des deux pilotes de l’écurie « phare » Mercèdes ! Il se trouve que j’ai des « attaches » fortes avec le Mexique, Mexico City, où j’ai vécu en 1955/1956 et étant l’ami des frères Rodrigues,mon Père étant l’ami de leur Père. A l’époque, pas d’autodrome alors l’ont faisaient nos excès de vitesse avec leur Porshe RSK spyder sur l’ Aérodrome de Mexico City au grand dam de la tour de contrôle…
Écrit par : François Libert | 02/11/2015
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Le scenario de la course n’a pas été à la hauteur de la ferveur du public mexicain et l’ambiance du stadium était autrement survoltée que celle à Hockenheim. La longue ligne droite n’a pas fait l’objet de dépassements décisifs et n’a pas servi de juge de paix. Rosberg a parfaitement géré sa course et mérite sa victoire. On a peut-être été privé d’un duel dans les derniers tours comme à Austin, Mercedes n’a pas voulu prendre ce risque de voir ses pilotes s’affronter en fin de course sur l’usure des pneus celui les ayant mieux préservés pouvant porter une attaque.… Lire la suite »
Eh bien voilà deux chenapans rappelés à l’humilité [Même si le plus titré des deux l’a acquis de son avant-dernière (sic) saison]. Et l’élégance n’y perd rien. Continuons avec l’analyse de bordures, je n’ai pas détesté voir un pilote enlever son casque avant de sortir de voiture et saluer, un peu comme on lève son chapeau ou qu’on se montre sans masque, ça également change de ces petits bonhommes (Par la taille) à grosse têtes, sautillants. Sinon je n’ai pas détesté non plus le retour à l’envoyeur nordique. On dit qu’il faut se faire respecter en piste et que jadis… Lire la suite »
Bonjour, à propos de la mort de Pedro Rodriguez, je trouve bizarre l’acharnement à vouloir qualifier la course d’Intersérie dans laquelle il a trouvé la mort « d’épreuve secondaire ». Cela me choque beaucoup plus encore sous la plume de Johnny qui a vécu les années 60 et 70 que lorsque c’est écrit par « jeune poussin » qui n’a jamais connu autre chose que la F1 et les 24 heures du Mans.
Michel Delannoy
Écrit par : Michel Delannoy | 03/11/2015
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Cher Michel, Juste pour signifier (en raccourci) qu’il ne s’agissait pas d’une épreuve du championnat du monde où Pedro était lié avec Porsche. Là il pilotait une Ferrari 512 d’emprunt. Liberté lui en avait été laissée car il ne s’agissait pas d’une course de premier plan. Le terme « secondaire » est parfois employé pour qualifier la course où s’est tué Jim Clark. Là je le récuse car il s’agissait une course du championnat d’Europe, un championnat international donc. L’interdire état un championnat allemand. Il n’était international que par la présence de pilotes étrangers. Mais c’était un championnat national. Écrit par :… Lire la suite »
J’ai écrit l’intersérie mais l’ordinateur a traduit par interdire. Excuses.
Écrit par : Johnny Rives | 03/11/2015
A Michel: Au sujet de la disparition de Pedro Rodriguez, je réitère le commentaire que j’avais fait sur memorytso. => Interpellé par la remarque de linas27 – distant conviendrait sans doute mieux qu’arrogant – je me suis documenté sur les circonstances de la disparition de Pedro Rodriguez et fait quelques découvertes: – 1. comme pour Jim Clark, Pedro n’aurait pas dû disputer cette « stupide » course du Norisring puisqu’il avait un engagement à la Canam sur une BRM, hélas pas prête ce jour là. – 2. son ancien coéquipier Leo Kinnunen présent dans cette épreuve avec une Porsche 917 spyder avait… Lire la suite »
Très intéressant, l’article vers lequel vous renvoyez, Francis Rainaut. Pedro Rodriguez était effectivement phénoménal sous la pluie. On se souvient de ses duels avec Jacky Ickx dans ces circonstances et de sa prodigieuse démonstration au Boac 1000, à Brands Hatch, sur la 917. Je ne sais plus quel observateur, médusé, avait eu ce mot d’humour : « Quelqu’un a-t-il informé Pedro qu’il pleut ? » L’article évoque un défaut de maintenance de la 512S, la perte d’une roue ? Etrange : pour Ricardo, on a aussi pensé à la sortie de route de Trintignant au GP des USA 1962, qui aurait pu… Lire la suite »
Jim Clark aurait dû piloter en Angleterre pour le BOAC 500 un proto V8 d’Alan Mann le jour du drame ,et seule une confirmation tardive de cet engagement l’enverra dans les arbres . Le destin frappera souvent les pilotes les jours où ils auraient souhaité être ailleurs . Ayrton .. Les organisateurs mexicains renoncèrent vite à leur grand-prix après la disparition de leur idole.Les britanniques s’emparent alors de ce 24 octobre devenu vacant pour organiser une épreuve en l’honneur du nouveau double champion du monde écossais. Après avoir couru près de quarante courses, perdu son adversaire direct , l’inusable Pedro,… Lire la suite »
A mon humble avis, le sieur Johnny s’est loupé entre les grands prix d’Hongrie et de Belgique, auxquels il attribue le n° 10 et 12. Ainsi, il intitule ce texte, par ailleurs excellent, ‘Mexico 18’ alors qu’en réalité, ce grand prix était le 17ème de cette saison 2015. Quant à l’engagement de Pedro au Norisring en juillet 1971, apparamment il devait être un peu partout puisqu’il était aussi l’invité de Jo Ramirez ce week-end. C’est Herbie Müller qui l’avait tenté.
Écrit par : franky hungenaert | 03/11/2015
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Johnny n’y est pour rien, c’est moi, l’éditeur, qui ai sans doute trouvé le temps long entre la Hongrie et la Belgique, au point de créer un Grand Prix fantôme. Le « 11 » n’était pas au bon endroit. Merci de l’avoir fait remarquer.
Écrit par : Olivier Rogar | 03/11/2015