Spa aurait du être une fête mais Sébastien Clouzeau s’est tué lors de la course de F3 Classic. Rappelant une nouvelle fois le danger de ce sport que nous aimons malgré tout et par dessus tout. Ironie du sort, ce pilote avait publié un texte sur newsclassicracing au sujet de sa première course à Spa en 2010 et Autodiva n°16 est en partie consacré à l’essai de sa F3 précisément.
Classic COURSES s’associe à Philippe Robert pour dédier ce texte à la mémoire de Sébastien Clouzeau.
Spa ! Le toboggan des Ardennes,… le raidillon, l’eau rouge, Siffert et Rodriguez en 917 côte à côte dans le raidillon : bref j’avais rendez-vous avec le mythe !
Une longue route pour monter jusqu’à Spa depuis Toulon comme vous pouvez l’imaginer. Surtout que s’y ajoutent des soucis de voiture tractrice.
Arrivée tardive sur le circuit. On est vraiment dans une région vallonnée, qu’est ce que ça monte de partout ! (Bon faut être juste ça descend aussi !).
Essais libres, formalités administratives.
Comme d’habitude j’ai bien regardé les vidéos sur YouTube et je ne suis pas trop dépaysé. Mais là encore qu’est ce que ça monte et ça descend ! 100 m entre le point le plus haut et le plus bas, et le raidillon justifie pleinement son nom : 50 m pour lui tout seul ! Les images a la TV rendent bien peu cette pente.
Les essais libres ne se passent pas trop mal, bien sûr ce n’est pas chronométré. Pour la première fois j’ai mis un Hans®, ça ne gêne pas trop.
Nous courrons, nous les 25 petits Français, avec 35 Anglais qui possèdent des voitures bien plus puissantes que les nôtres : Ferrari, Lotus, Porsche, etc… Il va falloir surveiller ses rétros d’autant qu’ils sont précédés d’une bien mauvaise réputation (normal de la part de Français) de vous pousser sans ménagement pour passer.
Deux copains me chauffent avec le virage de Pouhon (appelé aussi Double Gauche), virage très long en descente après Rivage : « A fond de 5eme ! » qu’ils me disent…! Mouais…. Faut voir ! Moi je freine, passe en 4ème et ensuite j’ouvre en grand et je passe la 5eme a fond juste avant le deuxième virage du double gauche. Ça va déjà très vite et je vois mal comment passer à fond …..
Essais chronos :
Bon on est 60 sur la piste pour 30 mn d’essais. Le circuit est long (7km) mais il est toutefois difficile d’avoir un tour clair et il faut gérer les dépassements des concurrents plus rapides tout en faisant ses temps.
Je me fais ramarrer petit à petit par mes fameux collègues et ils me passent sans bavure. Et justement l’un des deux dans sa Rover 3500 me passe justement avant Pouhon. Il va pouvoir me faire une brillante démonstration de sa théorie… !
Ça ne manque pas ! Ah il a un gros cœur et je vois la Rover qui s’embarque dans une très belle figure mais très (très) en dehors de la piste ! Je me marre ! (et lui aussi mais un peu moins…). Heureusement il y a de très grands dégagements à cet endroit.
Je suis pas mécontent de moi dans la remontée vers Blanchimont à fond absolu et l’épingle (ou Bus Stop) me pose toujours des problèmes : j’arrive trop vite.
Je suis aussi content du Raidillon, je passe en 5eme, je lève juste avant la cassure du bas pour poser la voiture et ensuite je suis a fond. Je mors généreusement sur tous les vibreurs qui passent a ma portée.
La sortie tout là haut ? Ben on voit rien et on sait bien qu’il faudra bien tourner a gauche, mais quand ? Et la voiture qui se fait légère, légère…..
Quand on est seul encore ça va mais quand on est 2 …..
Bon j’ai fait mes temps, mouais…. Mes deux lascars sont juste devant moi et j’ai 2 Alfas devant. Demain sera un autre jour.
Course 1 :
Départ lancé. Ça se passe bien. On est 65 je vous rappelle sur la piste et miracle de l’Entente Cordiale, pas de bobos.
Je suis bien et j’ai décidé d’attaquer ! Ça va être la guerre (non mais !) mais Franco-Française.
Je remonte la Rover de façon évidente. Au bout de la ligne droite des Combes je suis a sa hauteur, il freine mieux, ça sera donc pour plus tard. On se suis (tiens il ne passe plus Pouhon a fond …) et je fini par le passer sur ma vitesse après Blanchimont (vous vous souvenez, je vous avais dit que j’y étais pas mal….).
J’arrive tant bien que mal a passer le Bus Stop en vrac complet mais la Rover ne me passe pas (il faut dire que je tenais beaucoup de place…).
Et d’un !
Mon 2ème lascar est en Fiat 131. Avec son physique de boîte à chaussures, je lui reprends des longueurs dans la ligne droite qui suit le raidillon et je le passe sans coup férir aux Combes.
Et de deux !
Devant moi il y a la même voiture que la mienne (noire avec une bande orange, on n’a vu qu’elle sur les vidéos de Dijon). J’ai l’impression que je le suis sans problème.
Une Porsche me double par la droite au premier freinage des Combes. Je le vois partir en travers devant moi, il traverse mon champ de vision et j’entends distinctement le bruit de l’impact de la voiture sur les rails sur ma gauche.
Le virage suivant est encore a droite, l’Alfa devant moi se dandine fortement : trop tard pour moi ! Je glisse sur l’huile déposée sur la piste (c’est ce qui a sorti la Porsche) et je pars dans une belle figure…. PAS LES GRAVIERS !
J’ai fait un 180° suivi d’un 360° dans l’autre sens, mais surtout j’ai évité les graviers !
C’est le plus important car sinon la course est finie. Une Porsche finira au bac au tout suivant.
Bon mes deux lascars sont repassés devant en se gondolant…. Ainsi qu’une grosse BMW 635. Va falloir repartir en chasse.
Je finirais par reprendre la Rover et avec la BMW ça sera la bagarre jusqu’à la fin (en ligne droite je suis déposé ….) mais grâce à ma remontée de Blanchimont (vous savez bien…. j’y suis pas trop mal…) j’arrive à sa hauteur à la chicane. Je fais l’intérieur absolument en vrac, je manque de m’emplâtrer une Porsche qui passait par là mais j’évite tout le monde et je passe la 635….
Je ne suis pas mécontent de moi …..
Qu’est ce qu’on s’amuse !
On tombe dans les bras avec mes lascars. C’est bon !
Course 2 :
Bon j’ai encore une Alfa devant moi (la fameuse noire) et 2 derrières. Il me faut donc arracher l’Alfa noire de devant moi si je veux finir premier des Alfa (car il y a un classement séparé) sans me faire reprendre par ceux de derrière.
Départ sans trop de problèmes même dans le raidillon. On passe les Combes toujours plus ou moins en formation et on attaque la descente. Le pilote de l’Alfa noire est chaud comme la braise et part dans une magistrale figure dans Pouhon (vous savez celui qui se passe « A fond de 5eme »). Trois autres voitures devant moi sont gênées et font des écarts, je plonge à la corde et j’en passe 3 d’un coup !
Finalement ça se présente pas mal, je suis premier des Alfa, il va falloir maintenant gérer et ne pas se faire remonter.
J’ai la 3ème Golf GTI en ligne de mire et je surveille la Rover qui est derrière moi. Elle est a quelques longueurs mais je n’ai pas droit à l’erreur.
Trois tours se passent sans trop de problèmes et les premiers commencent à nous doubler. On les laisse passer sans trop les gêner et sans se mettre dehors mais cette f….. Rover est toujours dans mes rétros.
Au bout de la ligne droite avant les Combes une Porsche va me passer, je ralentis pour ne pas la gêner et la Rover se glisse dans le trou de serrure ! F..k ! comme disent les Britons.
Bon on ne s’affole pas, je soigne mes trajectoires et je suis pas mal à la remontée (mais ça vous le saviez déjà !). Je colle la Rover et me met a sa hauteur au Bus Stop. Il a de meilleurs freins que moi et je bloque à peu près tout ce qu’on peut bloquer, je vais me l’encadrer mais il a bien vu le coup et s’écarte, passe par dessus le vibreur. Ouf ! On ne s’est pas touché et je suis devant.
Je négocie peut être trop prudemment le raidillon et il me passe dans la montée ! Chapeau !
Je lui prends l’aspiration dans la ligne droite et me mets a sa portée avant le freinage non sans lui avoir montré mon pouce levé pour le féliciter de sa manœuvre.
Le freinage est très chaud, là encore je vois très bien ses portes latérales de face mais la encore la Rover virevolte et passe les Combes.
Je n’ai plus de freins et mes pneus sont trop chauds, ça glisse trop, j’essaie un baroud d’honneur a ma dernière remontée de Blanchimont mais ça ne suffira pas !
Bon je suis premier des Alfa, le roi n’est pas mon cousin !
Philippe ROBERT
Photos @ Philippe Robert
Video @ Philippe Robert