F1 2015 : Le billet de J. Rives – Australie 1
CIRCULEZ, Y A RIEN À VOIR !
Vivement le Grand Prix de Malaisie ! Que nous a apporté l’ouverture du championnat 2015 de F1 en Australie ? Deux éléments positifs : l’intégration réussie de Sebastian Vettel dans la Scuderia Ferrari. Et les débuts parfaitement accomplis du jeune Brésilien Felipe Nasr, auteur d’un prometteur sans faute. Hélas, on n’a pas, au plan des bonnes surprises, eu grand chose d’autre à se mettre sous la dent. Comme disait Coluche : « Circulez, y a rien à voir ! »
Johnny Rives
En revanche, les mauvaises surprises n’ont pas épargné grand monde à Melbourne, de McLaren à Lotus en passant par Renault. Sans oublier, aux yeux du spectateur, l’outrageuse domination des Mercedes. La hiérarchie naturelle des valeurs en présence, au sein de cette équipe, n’annonce en effet rien de bon à ceux qui espéraient au moins (!) assister à un duel fratricide entre Lewis Hamilton et Nico Rosberg.
La domination du dernier nommé lors de la première journée d’essais, vendredi, s’est évaporée dans la chaleur de l’été austral dès le samedi. Pour disparaître totalement dimanche pendant la course. Les six dixièmes de seconde creusés par Hamilton en qualif ne constituaient pas un faux-semblant. Certes, en course, Rosberg n’a jamais été distancé de plus de trois secondes par son équipier. Mais jamais il n’a réussi à s’en approcher sous le fatidique retard d’une seconde qui lui aurait permis d’utiliser son DRS, donc de gagner quelques km/h en ligne droite. Dès qu’il faisait mine de se rapprocher, Hamilton resserrait sa cadence. Avec finesse. Juste assez pour garder ces deux ou trois secondes d’avantage. Et aller signer une victoire sans histoire. Et c’est bien ça qui nous chiffonne !
Vivement le Grand Prix de Malaisie ? Non, bien sûr, je galèje ! Que pourrait-il nous apporter de différent par rapport à celui que l’on vient de subir ? Un circuit plus varié que le monotone tracé de Melbourne, ça c’est certain. Je soupçonne Jacques Villeneuve d’en dire du bien tout bonnement parce qu’il y avait signé un de ses premiers exploits en 1996. Ceux qui ont suivi les Grands Prix d’Australie à l’époque du circuit d’Adelaïde, qui a donné lieu à tant de combats épiques, me comprendront.
Un circuit plus varié, certes, mais sur lequel les Mercedes W06 risquent d’exprimer avec plus de morgue encore leur suprématie incontestable. Et hélas incontestée. Car on n’est plus en 1954. Quand, deux semaines après avoir ridiculisé à Reims les Ferrari et les Maserati, jusque là reines des Grands Prix, les Mercedes W196 avaient subi une défaite rassurante à Silverstone. Rassurante mais vaine, car dès l’épreuve suivante (Nurburgring), Fangio exploitait irrésistiblement sa nouvelle carrosserie argentée – à roues apparentes, contrairement à la carrosserie profilée qui avait fait merveille à Reims et fiasco à Silverstone. Ce Grand Prix d’Allemagne rédempteur avait permis au public enthousiaste d’oublier l’amertume de la défaite subie dix ans plus tôt par son pays : au bout du compte Mercedes avait, grâce au grand Fangio, gagné comme à ses plus belles heures d’avant-guerre. Et de surcroit Karl Kling et Herrman Lang s’étaient livrés un duel fratricide digne de ceux ayant opposé Caracciola à von Brauchitsch dans les années 1930. Duel au cours duquel ils s’étaient brulés les doigts au bénéfice de Fangio. Et dont l’équipe Mercedes d’aujourd’hui semble s’être mise à l’abri après les passes d’armes que l’on sait entre Hamilton et Rosberg l’année dernière. Bref, ne rêvons pas…
Le Grand Prix de Malaisie réserve très peu de chances de nous intéresser plus que celui que l’on vient de suivre – notez que je n’ai pas écrit « que l’on vient de vivre ». La situation de la F1 est devenue très préoccupante pour des raisons bien plus préoccupantes que le bruit assourdi des moteurs hybrides. Sur les réseaux sociaux le public s’en donne à cœur joie, si l’on peut dire, en exprimant des critiques adressées tantôt à Bernie Ecclestone, tantôt à Jean Todt.
Le premier semble rejeter entièrement sur la FIA la responsabilité de la situation actuelle. Il n’a peut-être pas tort. Mais selon moi ça n’est pas la FIA présidée par Todt qu’il faut incriminer. Mais celle d’il y a 30 ans et que présidait un autre Français, Jean-Marie Balestre. Lequel a, sous le prétexte des Accords de la Concorde qui ont mis fin à un long conflit entre les écuries de F1 et la fédération, a offert généreusement les pleins pouvoirs à Ecclestone qui ne demandait que ça. Et qui n’a eu qu’un credo : s’enrichir au moyen de cette poule aux œufs d’or qui est en train de mourir de vieillesse. Ecclestone a gagné, mais le sport a perdu. Et nous aussi, par la même occasion.
A l’issue du triomphe des Mercedes en Australie, en voyant les visages radieux de Toto Wolff et de Niki Lauda congratulant les membres de leur équipe, je me suis demandé s’ils mesuraient la gravité de la situation. Car à quoi bon triompher pour le renom de son entreprise si le public se désintéresse des combats qu’elle mène ? Une victoire à la Pyrrhus n’est, sans aucun doute, pas l’effet recherché. Mais qui trouvera la bonne solution pour résoudre cette situation paradoxale ?
Je l’ai dit sur les réseaux sociaux, je le répète : le cancer de la F1 actuellement s’appelle Ecclestone. Si on veut avoir une chance de rémission pour le sport que l’on aime (a aimé ?), il faudrait éradiquer ce vilain monsieur corrompu qui est en train de puiser les dernières gouttes de sève de l’arbre pour assurer… assurer quoi, au fait ? Son avenir ?… Les dictateurs ne sont pas éternels, on l’a vu dans le passé proche. Mais on voit aussi que si la relève n’a pas été correctement préparée, le remède est pire que le mal. Écrit… Lire la suite »
Faut-il vraiment accabler Bernie Ecclestone de tous les maux ? Le partage de pouvoir avec Balestre était clair et c’est bien la FIA qui est toujours seule responsable des règlements sportifs et techniques. C’est bien elle qui a imposé la motorisation hybride très onéreuse qui creuse les écarts entre ceux qui la maîtrisent et ceux qui pataugent. Ecclestone était pour le maintien de l’atmosphérique et l’a toujours affirmé haut et fort. S’ajoute à cette technique un cortège de restrictions absconses : limitation du nombre de moteurs ou d’organes périphériques, gel assorti de « jetons » d’évolutions, etc. Je n’ai pas eu le… Lire la suite »
Le portrait de Dorian gray
Écrit par : Jules | 18/03/2015
Bonne idée la Sauber en chapeau de la note de Johnny , sa robe est la plus Classic Courses du plateau 2015 avec la Williams, peut-être.
Écrit par : jean-paul orjebin | 18/03/2015
Si Hamilton domine comme il l’avait fait à la fin de saison à Abu Dhabi ce GP est bien différent de ce que l’on a connu en 2014. D’abord que d’abandons et quel maigre plateau! Le plus étonnant est de voir la position actuelle de Alonso star chez Ferrari jusqu’à l’arrivée de Vettel qui mit fin à ses hésitations et le déstabilisa. Retour obligé à la case Mc Laren Honda et nouveau coup dur à Montmelo où personne ne comprit les causes de la sortie de route pas même Vettel qui le suivait. Une hospitalisation prolongée suivie d’une impasse en… Lire la suite »
Je pensais que les pleins pouvoirs à vie (100 ans) avaient été conférés à la FOM par Mosley…
Ballestre s’étant montré plus raisonnable .
Écrit par : Marc | 18/03/2015
Balestre a abandonné les pleins pouvoirs à Ecclestone à partir de 1982. Bien avant Mosley. Qui n’a, c’est vrai, rien entrepris pour aller dans l’autre sens.
Écrit par : Johnny Rives | 18/03/2015
Malgré ma rupture complète avec cette formule 1 du 21ème siècle, il est toujours agréable de lire comme au temps de l’Equipe ou Sport auto les comptes rendus de Johnny Rives. Je le trouves même persévérant de continuer à nous transmettre cette passion qui est sa vie. Comment cette Formule 1 peut elle être devenue ennuyeuse à souhait?. Depuis le Drame d’Imola en 1994, soit 20 ans j’ai l’impression qu’un vertige immense s’est abattu progressivement sur la formule 1. Cela dit il reste des Champions et comme écrit par Jean Paul Orjebin, la Sauber est pourvue d’un certain esthétisme. Écrit… Lire la suite »
Comme au temps de L’Equipe et de Sport Auto? L’Equipe, c’est vrai, c’est du passé. Mais Sport Auto, non: j’y ai une chronique historique. J’espère que vous l’appréciez.
Écrit par : Johnny Rives | 18/03/2015
Oui Monsieur Rives, je voulais dire que Balestre s’était montré plus raisonnable dans la durée de la concession et n’avait pas favorisé un holdup de la FOM !
Écrit par : Marc | 18/03/2015