Ce G.P. d’Europe, sur l’improbable circuit tracé dans les rues de Bakou, promettait d’être une course infernale. Ce pronostic tenait à plusieurs constatations. D’abord les incidents à répétition ayant émaillé les essais, et auxquels Hamilton lui-même n’avait pu échapper. Rarement l’on avait connu pareille fréquentation des échappatoires. A cela s’ajoutait l’extrême confusion ayant régné lors de la première course de GP2, le samedi (10 arrivants seulement sur 22 au départ !). Or, rien de ce que l‘on craignait ne s’est produit, le jour J. La montagne a – heureusement ! – accouché d’une souris. Pas l’ombre d’une « safety car ». Pas une bousculade dans ce que le tandem Fébreau-Villeneuve surnomma le «coupe gorge ». Rien. Rarement Grand Prix n’a donné lieu à un déroulement aussi paisible, aussi clair. Et pour tout dire aussi monotone. Nico Rosberg en a profité pour joliment prendre une revanche sur le mauvais sort. Tant mieux pour lui.
Johnny RIVES.
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ROSBERG PEUT SOURIRE. –
Depuis le G.P. d’Espagne, Nico Rosberg avait payé l’insolente domination qu’il avait exercée lors des quatre premiers Grands Prix de la saison, et les cent points au championnat qu’il avait thésaurisés : accrochage avec Hamilton en Catalogne (abandon), freinage insuffisamment accordé aux conditions pluvieuses à Monaco (7e), bousculade avec Hamilton à Montréal où il n’avait pas réussi à combler totalement son handicap initial. Bilan : son avance au championnat avait fondu comme neige au soleil. Mais à Bakou, il a renoué avec les conditions qui lui avaient si bien souri en début de saison : pole, départ bien réussi, en tête devant Ricciardo au premier virage.
Et dès lors une cavalcade rapide, régulière et immaculée jusqu’à l’arrivée. Même son changement de pneus ne lui coûta rien. Il possédait 40 secondes d’avance sur Raïkkonen au 20e Quand il passa des « super tendres » aux « tendres » (21e tour) il se retrouva avec une quinzaine de secondes d’avance sur les Ferrari – Raïkkonen ayant entre temps obligeamment cédé sa 2e place à Vettel. Nico n’avait plus qu’à assurer une victoire amplement méritée. Il la cueillit avec son beau sourire, mais sans forfanterie. Il a appris à gagner, désormais. On l’en félicite.
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HAMILTON EMBARRASSÉ. –
Pour Lewis Hamilton, qui avait si largement triomphé à Monaco et Montréal, ce G.P. d’Europe était mission impossible. Aux essais, il paraissait pourtant maîtriser les difficultés proposées par le (discutable) circuit de Bakou. Il devança Rosberg dans chacune des trois séances « libres ». Quand soudain, lors des qualifications, tout se dérégla pour lui. En Q1, Rosberg prit les affaires en mains, ce qu’il confirma en Q2 en signant ce qui devait rester le tour le plus rapide du week-end (1’42’’520). Car en Q3, débarrassé d’Hamilton il n’eut plus à forcer pour s’adjuger la pole. Hamilton ? On l’avait senti aux abois quand, à l’instar de Raïkkonen, Button, Grosjean, Hulkenberg, et quelques autres pilotes recherchant désespérément leurs limites (pratiquement tous !), il s’était retrouvé à deux reprises dans les échappatoires. Pour finir, Hamilton nous fit une « Verstappen » en tapant de la roue avant droite une corde serrée de trop près, cassant net sa biellette de direction. Cela lui coûta de s’élancer en 5e Avec la longue ligne droite du circuit de Bakou (2 km) il aurait pu trouver une alliée pour faire fructifier son moteur Mercedes. Mais non. Il se plaignit abondamment du fonctionnement erratique de sa cavalerie sans que ses ingénieurs puissent venir à son secours – merci au règlement de limiter leur intervention radiophonique. Rosberg eut le même souci mais il ne s’en plaignit pas. Finalement Hamilton dut se satisfaire d’avoir pu défendre sa 5e place devant Bottas, Ricciardo et Verstappen – ces deux derniers ayant dû changer deux fois de pneus.
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LE BONHEUR DE VETTEL.-
Battu mais visiblement heureux à Montréal, Sebastian Vettel nous a rejoué la même partition à Bakou : sur le podium, une nouvelle fois 2e derrière une Mercedes, il manifestait son bonheur avec le même entrain que s’il avait gagné. Il faudra qu’un jour quelqu’un lui demande des éclaircissements sur ce qui nous apparaît comme un paradoxe : les pilotes de F1 sont dans leur grande majorité des compétiteurs qui détestent perdre. Autant, sur le même podium, on pouvait comprendre la joie du Mexicain Sergio Perez pour qui, une 3e place décrochée au volant d’une Force India peut s’apparenter à une victoire. A l’inverse, l’exultation de Vettel échappait à l’entendement. Car elle n’était pas feinte. L’Allemand y est-il poussé par des informations concernant les progrès à venir des Ferrari, des progrès que l’on lui annoncerait considérables ?
Finalement cette 2e place de Vettel, renforcée par la 4e de Raïkkonen, constitue un bilan relativement inattendu pour la Scuderia Ferrari. On la croyait au 36e dessous à l’issue de la première journée d’essais : vendredi soir, Vettel n’avait que le 8e temps à deux secondes pleines de la Mercedes d’Hamilton. Il était précédé entre autres par les deux Force India ainsi que par la Toro Rosso de Carlos Sainz, propulsée par un moteur Ferrari type 2015. Raïkkonen était encore plus loin (13e position).
Samedi matin les choses avaient un peu progressé (Vettel 5e temps, Raïkkonen 10e). Puis en qualif, tout parut se redresser. Certes il y avait encore 1’’2 d’écart entre la pole de Rosberg et le 4e temps de Vettel. Mais il s’en était fallu d’un souffle que l’Allemand ne soit qualifié en première ligne grâce à la pénalité de Perez – mais Ricciardo veillait au grain et c’est lui qui hérita de la place de l’infortuné Mexicain. Les Ferrari durent se satisfaire de monopoliser la 2e ligne, ça n’était pas si mal. En fin de compte, c’est peut-être d’avoir si bien surmonté les difficultés rencontrées le vendredi qui, peut-être, mit en joie Vettel sur le podium ? Au point d’en oublier que les Mercedes restent loin devant.
Illustrations © DR
Nico a gagné à Bakou comme Niki Lauda en son temps avec sang-froid et détermination , en effaçant de la carte son équipier argentin en 1977. Il y a ainsi certains jours du Carlos Reutemann chez Lewis Hamilton , avec cette faculté inexplicable à saborder son talent et diminuer ses forces acquises. Le miracle de la saison tient pour l’instant à cette faculté de l’un et l’autre à perdre le fil de la victoire, rendant toute analyse définitive intempestive et aussi fiable qu’une création de Colin Chapman des mauvais jours . Pour revenir à 1977, l’autrichien n’avait pas probablement pas… Lire la suite »
Christophe, même si je ne suis pas un fan transi d’Hamilton, je vous ferai remarquer qu’il a quand même trois titres de champion du monde sur les épaules, alors que le sombre Carlos n’en a aucun. « Lole » était un remarquable pilote, mais peu apte à supporter la pression lorsqu’elle devenait trop pénible, comme en 1981 où sa chère équipe, Williams, lui fit payer au prix fort son oukase de Rio en début de saison face au sacrosaint Alan Jones. En 1977, Lauda était lui aussi dans l’œil du cyclone au sein de son équipe, mais il était d’une autre trempe… Lire la suite »
Comme l’a dit Johnny RIVES discutable GP et je dirais même presque ennuyeux et par dessus le marché Julien FEBREAU annoncera victoire de PORSCHE aux 24 Heures du Mans alors que j’avais enregistré la dernière demi-heure de la course pour ne rien rater de la fin. Pourquoi n’a-t-il pas pensé à ceux qui aiment aussi l’endurance et le sport automobile en général, « je rage » encore. Bravo Toyota rendez-vous en 2017.
Merci johnny pour ton papier mais saches que le sourire de VETTEL est un bonheur car il prouve que ce garçon sait jouir de l’instant présent et en ces temps moroses cela est salvateur.Carpe diem
Je vois bien dans le titre et celui du billet sur Montréal que Mr. RIVES , à l’approche de ses 80 ans , s’est pris de passion pour le voyou hooligan anglais qu’est LOULOU . Perso , je sais que NICO lui est bien supérieur ( à chacun son avis ) mais que LOULOU après SPA 2014 l’a mieux joué coté communication externe ce qui a obligé MERCEDES à aller dans son sens et pénaliser ROSBERG . Car enfin SUZUKA 2015 , AUSTIN 2015 et MONTREAL 2016 sont des copié-collés ou à chaque fois LEWIS fait exprès de virer large… Lire la suite »
Cher Monsieur, J’ai le regret de vous dire qu’à l’approche de mes 80 ans – comme vous le soulignez avec tant d’élégance – je ne me sens pas, mais alors pas du tout, sénile. Je vous souhaite une longue vie.
@Richard Jego Cher Monsieur, Il me semble évident que nous regardons et suivons toujours les mêmes courses de F1, aussi observons-nous avec la même acuité les » coups » dispensés , de part et d’autre, par Rosberg et Hamilton depuis 2014, lors de leur confrontation pour le titre mondial ! Vous avez égréné ceux de Hamilton, je les partage sans ambiguïté avec vous. Vous serait – il possible de partager , les miens, pour des raisons d’équité et d’objectivité, ceux donnés par Rosberg : – Monaco 2014 – Canada 2014 – SPA 2014 – Hongrie 2015 – Australie 2016 –… Lire la suite »
@Richard Jego
J’ajoute , pour rappel, que le public se trompe rarement. SPA 2014, le public n’avait pas attendu » la communication externe » de Hamilton pour huer Rosberg au cours de la cérémonie du podium.
« C’est l’année de Nico, non ? » a lâché agacé en interne Lewis se débattant une fois de plus avec son moteur qui cafouillait, à la cartographie capricieuse. Que voulait-il donc dire? Il faudrait le demander au directeur exécutif Toto Wolff qui a toujours un discours officiel bien huilé quand il s’agit du respect de la parfaite équité envers ses pilotes.
Cher Johnny, j’ai le bonheur de vous écrire qu’à l’approche de la maturité – et cela est un don du temps – votre talent est une tranquille revanche sur les inélégances de l’époque . Je nous souhaite à tous de vous lire encore jusqu’au quinzième titre de Mick junior Shumacher ( dans l’hypothèse où Nyck de Vries ne parviendrait pas à obtenir un moteur Honda enfin compétitif pour dépasser ce record).
Cher Johnny, j’aurais bien aimé lire un avis un peu plus approfondi sur le circuit de Bakou. J’accorde depuis mes débuts d’amateur de F1 (c’est à dire 1991) une grande importance aux circuits. Pour moi, ils font partie intégrante du sport, au même titre que les pilotes ou les voitures. Ces dernières années, j’ai très souvent été frustré, voire consterné, par ce que nous proposait M. Tilke (d’ailleurs, pourquoi toujours lui ?). Mais là, à Bakou, j’ai été emballé. Certes, la 1ère partie du circuit n’est pas des plus passionnante; même s’il faut -selon moi- saluer le fait que les… Lire la suite »
Des bourdes dans mon texte (que j’ai posté en vitesse avant la pause déjeuner), désolé 🙂 « vf le virage 13 » « la simple vision de voir » « rendu […] rendu » Mea culpa ! J’ai pas mal lu de commentaires comparant Bakou à Macao. Et je trouve ça assez juste. Moi qui place Macao au sommet (devant Monaco) des circuits urbains, je trouve que cela parle en faveur de Bakou. Je ne comprends d’ailleurs pas que l’on se réjouisse tous les ans d’aller à Singapour: la nuit ne change pas un tracé ! On se plaignait -à juste titre- de Detroit et Phoenix… Lire la suite »
Totalement d’accord avec vous, Pierre-Antoine, sur cette aberration qu’est Singapour.
Cher Johnny, Dieu sait si ce n’est pas moi, fan de Moss, Rindt ou Peterson pour n’en citer que trois, qui vais aller à l’encontre de l’esprit de compétition mais je comprends assez bien le contentement de Vettel car en réalité que pouvait-il faire contre la Mercedes de Rosberg, d’autant que Nico a été dimanche réellement remarquable ? Elle était vraiment intouchable, donc avoir obtenu la meilleure place qu’il lui était possible d’espérer ne pouvait que le satisfaire. Reste à Ferrari à lui fournir une voiture rivalisant avec les flèches d’argent. Je voulais ajouter que je partage totalement les différents… Lire la suite »
Bien d’accord Daniel, sauf sur un point: les consignés données par radio des ingénieurs aux pilotes. Je suis ravi qu’elles ne soient plus autorisées. Rosberg a eu les mêmes ennuis qu’Hamilton, il s’en est débrouillé. Pas Lewis. Normal que Rosberg gagne. Et largement…Ne partages-tu pas?
Bien sûr Johnny c’est un point de vue qui se défend mais doit-on demander aux pilotes d’être en plus informaticiens en pleine course ? Comme -malheureusement- les F.1 ne peuvent plus se passer d’informatique, permettre aux ingénieurs d’aider leurs pilotes à résoudre un problème, au point où l’on en est arrivé cela ne me choque pas outre mesure. Cela étant, ma connaissance pratique des F.1 modernes étant, disons, succincte, le dinosaure que je suis – resté au temps des Weber 40 DCOE, de la Castrol R40, des boîtes Hewland et des Dunlop Racing – ne se croit pas autorisé à… Lire la suite »
Bonjour à tous
Bonjour à tous Je me permets de mettre ici, un commentaire laissé sur le blog de Jean Louis Moncet: @Jean Louis, je partage votre opinion positive sur Ferrari, enfin plutôt sur Vettel. J.Rives, dans son dernier post sur Classic Courses, relève la joie de Sebastian pour sa 2 place à l’arrivée de GP d’Europe. C’est vrai, compte tenu du rythme des Ferrari et leurs positions vendredi soir, que cette seconde place tient presque du miracle !!! Je crois pour ma part que la joie de Vettel tient peut être aussi au fait que malgré ce week-end difficile pour eux en… Lire la suite »