LA « BARAKA » ET LA SENSIBILITÉ D’UN CHAMPION PAS ORDINAIRE
1.Ferrari, 2. Mercedes, 3.Red Bull-Renault ? On a longtemps cru que le Grand Prix de Hongrie s’achèverait sur cette hiérarchie… surprenante. Une hiérarchie qui aurait surpris encore plus si elle s’était constituée ainsi : 1.Raïkkonen, 2.Rosberg, 3.Ricciardo. Mais voilà, après une indiscutable domination initiale des voitures rouges de la Scuderia, l’une d’entre elles finit par être ralentie, puis arrêtée par un mystérieux dysfonctionnement. Celle de Kimi bien sûr…
Johnny Rives
Comme souvent depuis le début de la saison, ce coup dur frappa la même victime. Cela aurait pu tout aussi bien être celle de Vettel. Mais non ! L’empêcheur de tourner en rond des Mercedes a été une fois de plus le gentil Sebastian, et non son partenaire décidément maudit. A croire que le toujours jeune Allemand porte en lui ce qu’en football on appelle familièrement la « baraka ». Il s’agit de la chance qui, en dehors d’un grand talent, colle à certains gardiens de but et leur vaut une réputation d’invincibilité. Ces gardiens que les clubs recherchent ardemment. La « baraka », Vettel l’a eue souvent avec lui par le passé. Et dimanche encore elle a participé autant que son éblouissant talent à faire de lui le pilote qui, on le parierait volontiers, fait secrètement fantasmer les responsables de Mercedes F1 dont il a causé le second échec de la saison. Et cette fois en illustrant son triomphe en rendant un hommage ô combien émouvant à Jules Bianchi pas plus tôt franchie la ligne d’arrivée. Cela, élégance suprême, en français. Ainsi, Vettel réussit avec une sensibilité non feinte à adresser au regretté jeune niçois un message encore plus profond et bouleversant que ceux qui lui avaient été rendus jusque là. Nous avons assisté à deux Grand Prix de Hongrie : celui ayant précédé l’accident d’Hulkenberg (intervention de la voiture de sécurité), puis celui qui a suivi après le regroupement général derrière Vettel. Le premier a été d’abord marqué par le double faux-pas initial des Mercedes qui ont perdu en quelques mètres au bénéfice des Ferrari l’énorme avantage qu’elles avaient marqué aux essais. Avec, second coup de théâtre, la rapide conséquence qui en est résultée, un demi-tour plus tard quand, ayant momentanément perdu la maîtrise de leur clairvoyance, Rosberg et Hamilton jouèrent à « Je t’ai vu, moi non plus » comme aurait pu écrire Gainsbourg ! Double hésitation qui se solda, au détriment de lui seul, par un crochet de Lewis dans le décor sans autre dommage que la perte de six places supplémentaires après les quatre perdues au départ !
Cela ne laissait plus que trois candidats pour la victoire : Vettel, Raïkkonen et Rosberg. Et même, s’aperçut-on bientôt, deux seulement. Car il apparut clairement que la Mercedes n°6 était, à raison de quelques petits dixièmes à chaque tour, incapable de suivre le rythme imposé par les Ferrari. La surprise était de taille car, au cours des deux journées d’essais précédentes, les monoplaces rouges ne s’étaient jamais montrées capables de se hisser au niveau des Mercedes. Or, là, elles les dominaient ! Mieux : malgré leur rythme plus élevé, elles sollicitaient moins durement leurs pneus. Cela leur permit de s’arrêter après leurs rivales et de reprendre la piste sans avoir eu à leur céder, fut-ce un bref laps de temps, aucune des deux premières places qu’elles s’étaient arrogées d’entrée de jeu.
Tant et si bien qu’à l’issue des premiers changements de pneus, la hiérarchie était la suivante (24e tour) : 1.Vettel, 2. à 6’’1 Raïkkonen, 3. à 12’’ Rosberg, 4. à 29’’ (roue dans roue) Ricciardo et Hamilton, 6. A 36’’ Bottas etc.
La perspective de la fin de course était rendue alléchante par le choix des pneus que chacun des prétendants venait de faire. Tandis que Vettel, Raïkkonen et Hamilton étaient repartis en gommes tendres (comme précédemment), Rosberg et Ricciardo avaient fait le pari contraire (pneus mediums). Dans l’objectif probable de rechausser des tendres pour le final, cependant que leurs adversaires seraient alors contraints de se rabattre sur les mediums, bien moins performants.
C’est alors que l’aileron avant d’Hulkenberg s’effondra (2edéfaillance technique d’importance chez Force India après la suspension cassée de Perez aux essais), remettant tout en cause. A commencer par la course du récent vainqueur des 24 Heures du Mans tout heureux de se tirer sain et sauf de sa mésaventure. Une fois la safety car en piste, tous les retardataires purent rattraper Vettel au ralenti derrière la voiture de sécurité. De plus, tous ceux qui avaient concédé un tour de retard précédemment eurent l’autorisation (légale mais quelque peu contestable) de se dédoubler. Ce dont certains, à l’image de Fernando Alonso, futur et inespéré 5e, tirèrent un avantage colossal et pas forcément mérité.
Au feu vert, le regroupement derrière Vettel promettait de déclencher une certaine cohue… qui ne manqua pas de se produire en plusieurs épisodes. C’est ainsi que le sympathique Ricciardo, ardent d’effacer un début de saison bien tiède par rapport à ce qu’il avait montré en 2014, bouscula à son corps défendant les deux Mercedes. Au point de les renvoyer à leur stand, Hamilton aileron endommagé, Rosberg pneu arrière crevé – sa propre Red Bull ayant également souffert de ces contacts qui firent surtout le désespoir de Rosberg.
Si un mage avait, samedi soir, prédit à Romain Grosjean que sa Lotus terminerait la course en s’intercalant entre les Mercedes, cela l’aurait sans doute fait sourire, incrédule. C’est pourtant bien ce qu’il réussit finalement, en se classant 7e entre Hamilton et Rosberg. Ce qui le fit également sourire d’ailleurs. Mais cette fois sans ironie.
Pour une fois qu’il se passe quelque chose sur le Hingaroring. Merci Johnny pour cette analyse à chaud une nouvelle fois en plein dans la cible. Et complètement d’accord avec toi sur l’élégance de Sébastien Vettel. Mais serions-nous les seuls à tomber sous le charme du pilote allemand ? Dans un récent et instructif dossier sur le sport automobile outre-Rhin, un hebdomadaire français bien connu donne la parole à plusieurs journalistes allemands qui livrent une constatation assez surprenante : Vettel est loin de passionner les foules dans une Allemagne qui n’a, apparemment, pas fait le deuil de Schumacher. Les gens… Lire la suite »
Vettel loin de passionner les foules allemandes? Sans doute, puisqu’une enquête sérieuse l’affirme. J’ai lu aussi, récemment, que le public (?) a établi les classement de ses pilotes préférés dans toute l’histoire de la F1 et que Fangio, le grand Fangio, n’y figure pas. L’ignorance est mère de bien des tares. Pour ceux qui n’ont pas vécu en son temps, Fangio n’a donc pas existé. Peut-être s’apercevra-t-on de la même façon, si un jour l’extrême droite avait la préférence du « public », que pour ce public Hitler n’a jamais existé non plus?
Écrit par : Johnny Rives | 28/07/2015
Tiens! Un point GODWIN.
C’est ballot ça ROSBERG en médium pour la fin de la course malgré l’analyse (Le constat) des ingénieurs.
Écrit par : Jules | 28/07/2015
Tout le monde connaît Fangio (enfin, du moins les amateurs de F1, c’est à dire de toute façon, au mieux 1% de la population ?) Aucune ignorance… simplement, c’est une chose très humaine et tout à fait logique de préférer un pilote qu’on a vu courir et qu’on a directement soutenu. Combien sont les fans de F1 qui peuvent prétendre avoir vu courir Fangio ???
Écrit par : jims | 31/07/2015
Non vous n’êtes pas seul à apprécier Vettel ! Pour le « suivre » depuis ses débuts que n’a-t-on entendu comme balivernes à son sujet : bébé usurpateur chez TR lors du limogeage de Bourdais, puis « sans Newey Vettel ne vaut rien » etc… Ce quadruple champion du monde, sain, fédérateur,intelligent, bosseur et archi talentueux n’a pas rencontré son public en Allemagne et peine à convaincre les fans décérébrés,ceux pour qui Fangio n’a jamais existé (!) ? Pas grave, sa statue se construit doucement sur la place du Duomo et ceux qui l’ont si copieusement sifflé à Monza vont cette année l’aduler. Merci… Lire la suite »
Après une minute de recueillement à la mémoire de Jules, les acteurs de la F1 évacuèrent leur émotion pour en découdre et nous offrir un magnifique GP. Une domination de bout en bout de Vettel qui rappelle ses années fastes chez Red Bull et Kimi la poisse qui n’a pas encore perdu son volant mais un ton en dessous, peut-être un avantage pour rester chez Ferrari. La Scuderia a été remarquable et en voyant ses mécaniciens au pied du podium on croyait revivre la période Schumacher. Ils ont su mieux s’adapter que la concurrence aux conditions changeantes de la météo… Lire la suite »