Wolfgang von Trips – 60 ans
C’était il y a 60 ans. Le 10 septembre 1961 se produisit à Monza la plus grande tragédie de l’histoire de la Formule 1. René Fiévet a relaté en détails sur Mémoires des Stands puis Classic Courses (voir liens ci-dessous) le contexte et les circonstances de cette catastrophe provoquée par l’accrochage entre la Lotus de Jim Clark et la Ferrari de Wolfgang von Trips. Pour marquer ce triste anniversaire, j’ai souhaité revenir sur un souvenir personnel relatif à ce tragique accident.
François BLAISE (avec Olivier FAVRE)
Voir aussi :
Classic Courses – Monza, le 10 septembre 1961 – 1/3
Monza, le 10 septembre 1961 – 2/3
Monza, le 10 septembre 1961 – 3/3
J’ai toujours été hanté par ce triste souvenir associant ces deux sympathiques pilotes que j’ai eu la chance de connaître sur les circuits. Le jeune (25 ans) et talentueux Jim Clark, qui n’est alors encore qu’un grand espoir du sport automobile. Et l’expérimenté Wolfgang von Trips, 33 ans, qui est en passe de devenir le premier champion du monde allemand.

L’accrochage
On se rappelle que c’est au deuxième tour que se produisit le drame. Trips vient alors de dépasser Jack Brabham, puis Jim Clark avec sa Ferrari 156 « Sharknose », qui est beaucoup plus rapide en vitesse de pointe que les montures de ses deux adversaires. Mais Jimmy Clark a profité de l’aspiration pour rester dans le sillage de « Taffy » Trips, qui ne l’a pas vu et pense qu’il est loin derrière lui. Les deux pilotes arrivent au freinage de la Parabolique, Trips est à l’extérieur de la piste ; il freine et se décale sur la gauche pour aborder la courbe sur la ligne idéale. Mais au même moment Clark tente de le dépasser par l’extérieur ; dans un trou de souris pour moi !
Dès lors l’accrochage est inévitable entre les deux voitures. La roue avant droite de la Lotus percute la roue arrière gauche de la Ferrari, qui est projetée dans la foule des spectateurs avant de revenir terminer sa course sur la piste. Quatorze spectateurs sont mortellement touchés, en plus de Wolfgang von Trips qui gît sur le bord de la piste après avoir été éjecté.

Le courrier de « Jabby »
J’ai toujours pensé qu’il s’agissait d’un fait de course. Et je me suis donc refusé à faire porter la responsabilité d’une telle tragédie sur l’un ou l’autre des deux pilotes. C’est pourquoi je ne pus que réagir lorsque début 1974 je lus ces mots sous la plume de Gérard Crombac, dans la revue Moteurs courses (1) : « … lorsqu’à Monza en 1961 sa voiture [de Clark] s’accrocha avec celle de « Taffy » Trips, il ne fait pas de doute que ce dernier en était le responsable … ».

J’écrivis donc à M. Crombac pour défendre la mémoire de Wolfgang von Trips et lui donner mon opinion sur cet accident de Monza. Il me répondit par une lettre, dans laquelle il maintenait sa position en s’appuyant sur le jugement d’un tribunal (2). Mais il l’atténuait néanmoins en admettant qu’il s’agissait d’un fait de course. Je livre ce courrier à l’appréciation des lecteurs de Classic Courses.

NOTES :
(1) Dans son numéro de décembre 73-mars 74, Moteurs courses publiait un dossier sur les « 4 Grands » (Fangio, Moss, Clark, Stewart). L’article sur Clark était, sans surprise, rédigé par le rédac’chef de Sport-Auto, qui connaissait intimement le pilote écossais. Ce fut le 102e et dernier numéro de cette excellente revue trimestrielle, plombée (comme d’autres) par la crise pétrolière d’octobre 1973.
(2) En fait, il n’y eut pas de procès. Le juge d’instruction chargé de l’affaire rendit une ordonnance de non-lieu en 1964. Ce qui actait officiellement qu’on ne pouvait imputer à Jim Clark la responsabilité de cet accident.
D’un autre côté, tout le monde aurait été étonné que G. Crombac trouve quoi que ce soit à reprocher à Jim Clark…
Jimmy et Jabby étaient de très bons amis . Il est difficile de critiquer et de trahir un ami intime et je ne peux pas en vouloir à Jabby Crombac .
Eh oui mon cher François 👋
Crombac était d’une partialité confondante en ce qui concerne Lotus, Chapman et Clark. Il était également très prompt à sortir des vacheries sur Ferrari. Il faut le savoir.
Merci Pierre pour ces informations que je ne connaissais pas .
C’est étonnant, j’étais persuadé que la partialité de Crombac et sa « britannophilie » était de notoriété publique. Jusqu’à sa casquette qui lui servait de porte-étendard…
Cette partialité était de notoriété publique et même mise en scène dans les pages de Sport Auto, à travers une rivalité surjouée avec Rosinski. Crombac adorait le rôle que lui permettait de tenir sa position de journaliste et s’était composé ce personnage à pipe et casquette à pompon que l’on qualifiera complaisamment de pittoresque. Je ne l’ai connu que comme lecteur mais il m’a toujours laissé l’impression d’un type un peu fallot qui trouvait dans ce rôle de chroniqueur, parfois d’intermédiaire (Schlesser dans la Honda à Rouen, c’est lui) une forme de légitimité. Et, donc, il aimait jouer les Anglais,… Lire la suite »
Falot Crombac !!!
Il fallaiT en avoir pour en 1961 lancer en France un mensuel sur le sport auto en France ! Qu’avez vous créé Ferdinand ?
Dans mon récit, publié par Mémoire des Stands puis Classic Courses, j’insistais beaucoup pour exonérer Jim Clark de la responsabilité de l’accident. Sa manœuvre était régulière, et il y avait largement la place pour passer entre le bord gauche de la piste et la Ferrari de von Trips. Au surplus, la Lotus de Clark se trouvait au même niveau que la Ferrari de von Trips au moment où ce dernier obliqua sur la gauche pour arrondir sa trajectoire. Toutefois, un lecteur de Mémoire des Stands, Hervé Delaunay, ancien coureur automobile, avait tenu à atténuer la portée de ma démonstration. Selon… Lire la suite »
René, je considère Jim Clark comme un des plus grands pilotes de tous les temps, et l’homme était éminemment respectable. Mais, si tu as pratiqué un tant soit peu les sports mécaniques, tu sais parfaitement que l’attaque idéale en bout de ligne droite (surtout à Monza et surtout à cette époque où les pilotes savaient qu’ils risquaient réellement leur vie) se faisait à l’intérieur et qu’ensuite c’était : « le premier qui freine est un lâche ». Pour une raison qui nous échappera toujours, Jim avait choisi l’extérieur, là où le pilote devant lui allait invariablement se rabattre sur sa gauche pour… Lire la suite »
Pour info , un simple clic von trips pour une recherche wikipedia permet de lire un extrait de la déclaration de CLARK à la police de Monza : « je me suis dirigé à gauche de Von Trips sans intention de le dépasser » .Les références sont sur wikipedia .
Je ne connaissais pas cette version du témoignage de Clark à la police italienne après l’accident, mais il est effectivement très possible qu’il ait essayé de diminuer sa responsabilité dans l’accident en occultant sa tentative de dépassement. Pour ma part, quand j’ai fait ma recherche, le témoignage de Clark disait ceci : « I was travelling on the left of the Ferrari » (je roulais à gauche de la Ferrari), ce qui revient un peu au même. A l’évidence, il n’a pas dit : « I was overtaking » ou « I was trying to overtake the Ferrari ». Mais… Lire la suite »
Je suis tout à fait d’accord avec René Fievet concernant cette version de l’accident .
Je suis tout à fait d’accord avec cette version de René Fiévet qui me semble la plus réaliste .
Oui, moi aussi. Je pense que Clark avait forcément l’intention de dépasser la Ferrari. C’est la seule façon d’expliquer sa présence sur la gauche de Trips.
je viens de lire la citation mais c’est très étrange tout de même. On dirait qu’il se contredit (il déclare dans un un premier temps qu’il « essayait de dépasser » ou est-ce la traduction qui est approximative ? puis « il a soudain tiré à gauche… il essayait probablement de prendre la courbe »… mouais…
Yannick, Oui, c’est exact : il y a une contradiction apparente dans le témoignage de Jim Clark. Mais apparente seulement : je suppose en effet qu’on peut se préparer à dépasser un autre concurrent, amorcer la manœuvre pour le faire (le déboitement), et finalement décider de ne pas le faire au tout dernier moment si l’affaire se présente mal. J’ai l’impression d’avoir vu ce genre de chose des centaines de fois sur les circuits automobiles. En fait, il ne faut pas attacher trop d’importance à ce témoignage devant la police italienne, qui a eu lieu peu après le drame, quand Clark… Lire la suite »
que la course peut etre tragique… mais très très belle photo de Von Trips pour illustrer l’article 🙂
Emmanuel , c’est une photo d’ Yves Debraine .
Mon regard sur ce terrible accident ne peut qu’être lointain : à l’époque, mes parents n’avaient pas la télévision… et je marchais tout juste ! Vos propos m’incitent, comme la plupart d’entre vous, à voir là un fait de course. Toutefois, l’observation de René Fiévet me semble judicieuse. Quant à la différence d’âge, elle me semble aussi jouer un rôle : Jim Clark est en F1 pour sa deuxième saison. Si son talent est immense, sa carrière de pilote de monoplace est encore mince, et son expérience des circuits est modeste, si on la compare à celle des générations de… Lire la suite »
Bien vu Christophe ;
tout autant que ce qu’a écrit Pierre Ménard sur la partialité de Crombac.
J’ai beaucoup lu, écoute et parlé au sujet de ce triste événement, un procès au pénal était hors de propos… tout comme l’objectivité de Mr.Crombac au sujet de Jim Clark, pilote plein de talent mais alors un tantinet inexpérimenté
Il est impossible de se fier à l’avis de Gérard Combrac, ami intime de Jim Clark, supporter de Lotus et admirateur de Colin Chapman. Trop de motifs de partialité…
Visiblement beaucoup , ici , ignorent que CROMBAC était de nationalité suisse ; pays célèbre pour sa neutralité et celle de ses citoyens .. .Moi , je me fie à lui car il était aussi le cofondateur de Sport auto , rédacteur en chef , et se devait d’impartialité dans ses compte-rendus pour développer les ventes .
SPORT AUTO n’a jamais été AUTOSPRINT ( pour ceux qui connaissent la revue italienne )
Je ne discuterai pas ici, ce n’est pas le lieu, de la neutralité suisse, mais je ne crois pas que le passeport suisse immunise du parti-pris, pas plus qu’un passeport français fait de son possesseur un bourreau des cœurs ou un cuisinier d’élite…
J’avais 15 ans quand je découvris sur le journal l’accident. Mais je ne comprenais pas comment s’était produit ce drame. Ce n’est que plus tard lorsque je vis les images en video prises sur le vif par des caméras que je me suis rendu compte de l’ampleur de celui-ci.
Les secours étaient quand même inexistants. Et surtout la course continuait.
Si notre Pape des journalistes de sport automobile Johnny Rives pouvait lire ce reportage ,
nous serions heureux de connaître son avis concernant cette tragédie du sport automobile.
Merci Olivier Rogar pour le contacter .