25 mars 2014

Tout ce qui roule est à Avignon !

Avignon Motor Festival honore cette année deux marques : Maserati dont c’est le centenaire et CG. Deux destins automobiles bien différents. Un astre – à éclipses – qui luit depuis un siècle dans les rêves des passionnés et un météore qui a illuminé la compétition et la production française de voitures de sport pendant à peine huit ans.

Maserati, Orsi, De Tomaso, Gessalin, Chappe et d’autres comme Ligier ou Potherat notamment… Des hommes de challenge, de conviction et d’enthousiasme auxquels nous nous intéresserons ici. Leurs projets n’ont pas toujours été durables, mais leur empreinte, industrielle, sportive ou culturelle demeure. Chez les amateurs comme chez les profanes. Une reconnaissance conférant à ces belles aventures une  dimension digne de celle dont jouissent les grandes œuvres.

 Olivier Rogar

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Avignon Motor Festival, 50 000 m² d’exposition, plus de 40 000 visiteurs et des sujets d’étonnement omni présents, du dragster au vélo solex, en passant par le Trophée Jacques Potherat qui maintient bien vivant l’esprit cycle-cariste, les marchands de pièces détachées, de livres, de miniatures, les défilés de mode, les démonstrations, les engins militaires – éloignés cette année du parking des anciennes toujours nombreuses – , les exposants compétition, prestige, motos, tracteurs, camions : tout ce qui roule est en Avignon !

Maserati

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Lorsqu’en décembre 1914 à Bologne, Alfieri entraine deux de ses frères dans la toute nouvelle « Societa Anonima Officine Alfieri Maserati » se doute- t- il que son aventure vivra plus de 100 ans ?

De la préparation des Isotta – Fraschini à la fabrication de bougies d’allumage, puis à la conception de voitures de courses – la Diatto –  ce n’est qu’en 1926 que nait la première automobile « Maserati », la Tipo 26.  Elle gagnera la Targa Florio la même année.

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L’arrivée des hordes automobiles allemandes en 1934 incite Maserati à se réfugier dans les catégories intermédiaires ( 1100 cm3 et 1500 cm3 ) avec notamment la 6 CM qui outre le fait d’être la première Maserati à être exposée au salon de Milan 1936, se constitue un grand palmarès en compétition.

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Mais en 1932 Alfieri a succombé des suites de son accident survenu lors de la Coupe Massine en 1927. Dès lors, malgré l’arrivée de Ettore Maserati auprès de Ernesto et Bindo la situation financière de la firme périclitera.

En 1937 la famille Orsi rachète les actions des frères Maserati, supposés libérés des contingences matérielles et pouvant se consacrer désormais à la seule création. La firme déménage à Modène, Orsi met sa propre équipe en place, marginalisant de ce fait les frères Maserati. La belle 8 CTF gagne pourtant les 500 Miles d’Indianapolis en 1938 puis en 1940. Les chemins des deux familles divergent définitivement en 1946. Les Maserati créant la firme OSCA (Officine Specializzata Costruzione Automobili). Mais ceci est une autre histoire !

 En 1948 la firme s’appuie sur la Typo 4 CLT de 1,5 l.

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 Maserati va entrer d’une part dans l’ère industrielle en commercialisant son premier véhicule de (grand) tourisme –la « A6 » et s’investir pleinement en compétition, que ce soit en catégorie « Sport » ou en Formule 1, dans les deux cas la montée en gamme se fait sous l’égide de l’Ingeniere Colombo, débauché de chez Alfa-Romeo. Après l’intérim assuré par l’A6 GCM en 1952, l’apogée de cet engagement a lieu en 1957 . La firme est couronnée en F1 avec la 250 F pilotée par Fangio et manque de peu le titre en Sport avec la surpuissante 450 S.

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C’est à ce moment que la firme annonce son retrait de la compétition. Ainsi après Alfa-Roméo, puis Lancia, Maserati laisse le champ libre à Ferrari pour représenter l’Italie au plus haut niveau de la compétition automobile.

Nous passerons sur de nouveaux déboires financiers, en 1958, dont la firme se sort grâce au lancement de la première vraie Maserati de route, la 3500 GT. Elle sera suivie jusqu’en 1968 par de nombreuse GT à moteurs 6 ou 8 cylindres qui pour la plupart puisent leur ADN dans la compétition.

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Aussi incongru que cela puisse paraître c’est à Citroën, elle-même sous tutelle Michelin depuis les « extravagances » du pauvre André Citroën avec sa révolutionnaire Traction Avant, que la famille Orsi vend ses actions en 1968.

Parce que Citroën cherche un moteur pour la SM. C’est connu, les français savent faire des moteurs de compétition nobles, mais pas de moteurs de route. C’est le mystère français. Giulio Alfieri va donc concevoir un V6 2,7 l pour la SM. Enfin, pour la SM… c’est vite dit…

Nous passerons donc sur les pièces Citroën qui orneront les tableaux de bord des Maserati, jusqu’au volant monobranche…, et sur les quelques sphères vertes qui aideront les bolides au Trident à se transformer en tapis volants… Jusqu’au jour glorieux où, en catimini, l’actionnaire français met piteusement sa danseuse en liquidation judiciaire.  Simplement.

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En 1971 nous aurons aussi eu droit à l’incroyable Boomerang de Giugiaro dont on retrouvera l’inspiration dans la future Lotus Esprit, du même Giugiaro.

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L’état italien et Alejandro de Tomaso unissent leurs efforts pour sauver Maserati. Graduellement tous les modèles prestigieux désormais difficiles à vendre – nous sommes en 1975 – sont arrêtés. La De Tomaso Deauville, rebadgée en Maserati Kyalami sert de modèle de transition en attendant les fameuses, fumeuses et formidables « Bi-Turbo » des années 80. Mais côté esthétique, cela relève plus du tuning que du noble art auquel les italiens nous ont habitués. Non vous n’aurez pas de photos.

Nous passerons sur le petit investissement fait par Chrysler à l’époque du bouillant Lee Iacocca pour rappeler que Maserati fait désormais partie du groupe Fiat , aux côtés de Ferrari. Mais c’est ici qu’il nous faut laisser l’histoire rejoindre une actualité qui serait hors sujet.

 CG

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Concernant l’autre grande exposition d’Avignon, CG, suivons le  programme. Il  nous y est expliqué que cette marque est née de l’association en 1946 des frères Chappe avec Amédée Gessalin qui avait épousé leur sœur. L’activité initiale de carrosserie, qui existait depuis 1930 dans la famille Chappe, a évolué vers la réalisation de cabines de camions, puis la réparation automobile et la construction de voitures destinées à la compétition. ( La « Bosvin-Michel-Spéciale »).

La compétence de l’établissement en matière de carrosserie en fibres de verre, l’amène à collaborer avec plusieurs fabricants dont Deutsch – Bonnet puis Charles Deutsch pour les CD Panhard et enfin Charles Escoffier, le beau père de Jean Rédélé, qui commande à Chappe et Gessalin 25 carrosseries de coach sur plateforme 4 CV et demande à ce dernier de les commercialiser. Chappe et Gessalin accompagne ainsi la naissance des célèbres Alpine Renault jusqu’au début des années 60, avec les A 106, A 108 et GT 4.

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Cette expérience va amener Chappe et Gessalin à se lancer directement dans la construction de berlinettes à partir de 1966 sur la base de châssis et de mécaniques Simca. Ainsi naitront les fameuses CG.

Malheureusement la montée en puissance de Chrysler au sein du capital de Simca et les liens que ces derniers entretiennent avec Matra au travers de l’engagement aux 24 heures du Mans, rendent impossible une collaboration avec CG. La crise pétrolière de 1973 et l’interdiction aussi provisoire que stupide de la compétition en France auront raison de CG dont l’aventure s’arrêtera en 1974. Resteront l’image de véhicules attachants et un palmarès très probant en compétition avec pour pilotes principaux : Bernard Fiorentino, Gérard Larrousse, Michel Saliba ou Philippe Renaudat.

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 Ligier

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Michel Tétu a conçu 16 Formule 1. Renault, Ligier, Larrousse. Une belle partie de la planète F1 française. Puis tel celui qui avait fait un long voyage, s’en est revenu chez Ligier vivre le reste de son temps. Ligier davantage impliqué dans les voiturettes sans permis désormais que dans les F1. Alors Michel Tétu s’occupe du Club Ligier JS2. Oui il l’a conçue celle là aussi. Comme les JS1 et JS3 d’ailleurs. Et d’autres, chez DB, chez Alfa – Romeo …

Comment lui épargner une question sur la nouvelle LMP2 conçue chez Jacques Nicolet – OAK Racing – et badgée Ligier ?  L’auto est belle, l’équipe compétente, Guy Ligier toujours passionné. Les hommes se comprennent. Une belle aventure est en cours. 

Son oeil brille à l’évocation de la nouvelle réglementation F1. Une révolution, captivante, éprouvante pour les ingénieurs, passionnante d’un point de vue technologique. Quel challenge ! Faire cohabiter des batteries qui délivrent des voltages avoisinant les 1000 Volts sous des ampérages du même ordre de grandeur avec des tuyaux d échappements, des réservoirs d’essence…  Pour la première fois depuis des années c’est la F1 qui va défricher des voies nouvelles pour l’automobile de série. On sent qu’il aimerait y être. 

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François Ligier accompagne Michel Tétu. François est le petit fils de Guy. Il tient les rennes d’Automobiles Ligier. Les utilitaires électriques et les voitures sans permis, c’est lui.  Une production de 9000 unités par an.  Mais qui les achètent ces voitures sans permis ? Le monde rural en majorité. Ca fait quelque chose de voir un Ligier s’occuper d’automobiles et s’intéresser également aux anciennes. Il est malheureusement peu probable que cela nous ramène au temps béni des F1 de Laffite et Depailler ou des voitures de grand tourisme. Impossible désormais à une petite structure de jouer la carte de l’originalité pour se démarquer en restant compétitive et rentable. La raison, la réglementation et les attentes parfois contradictoires de la clientèle sont passés par là. Le rêve n’est plus automobile.

Plusieurs JS2 sont exposées dont la dernière produite. La voiture du Patron. Phares basculants, climatisation, Moteur 3 L de la Mérak. Un peu moins d’une centaine construites. Toujours belles. Le dessin de Frua n’a pas vieilli. Et techniquement comme mécaniquement la structure de l’auto supporte parfaitement le poids des ans. Mon conseil : à collectionner d’urgence !

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Le trophée Jacques Potherat.

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Jacques Potherat celui par lequel on s’est mis à se souvenir et à regretter « l’époque où l’automobiliste était roi et sa bagnole reine ». Il a publié dans les années 90 ses fameuses « Histoires d’automobilistes » dans Auto Retro. Morceaux d’anthologie, reflets d’une époque ou seuls les originaux se permettaient la Bugatti ou l’Hispano dont personne ne voulait plus et qu’on abandonnait sur le Boulmich à la première défaillance.

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Son goût prononcé pour les copains et les voitures d’avant guerre l’avait conduit – normal – à créer un Syndicat… mais pas un syndicat banal comme on en parle le soir au journal, non, LE Syndicat , celui des Cyclecaristes.

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Une période de l’entre deux guerres, celle des années 20, où notre beau pays se distinguait déjà par l’imagination sans bride de notre administration et de la haute fonction publique. On taxerait les voitures, mais on laisserait aux plus modestes la possibilité de rouler en automobile sans trop subir le joug des agents du fisc. Et il est juste de le dire, c’est à ce dispositif que l’on doit la voiture des « Vacances de Monsieur Hulot », élément contribuant de façon non négligeable au charme de ce film.  Cyclecar ou voiturette : véhicule dont la cylindrée n’excèdera pas 1100 cc et le poids 350 kgs ! Pour le plus grand bénéfice de la sécurité publique, le nombre de places était limité à deux. avignon motor festival 2014,olivier rogar,classic courses,gérard gaud

Le Rallye qu’il avait créé sur les routes du Lubéron a été rebaptisé « Trophée Jacques Potherat » en 2008 , en hommage au journaliste disparu le 26 avril 2001. Les participants viennent de toute l’Europe, une soixantaine de voitures de toutes marques, d’avant guerre, constituent un plateau exceptionnel, depuis les tricycles Darmont, Morgan ou autres, aux Bentley, Bugatti, Aston Martin, MG ( de 1952 ! … ) , Amilcar, Adler, Salmson, Peugeot, Fiat, Lombard, Georges Irat, Riley, Standard Avon, Simca, Alvis, Becognee, Lea Francis, Robur, Bnc, Sandford, Austin, Alfa-Romeo, Lagonda…

Le temps du samedi donnait à l’épreuve des allures d’épopée digne de la grande époque.

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 Gordini.

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AutoDiva.

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La météo

Une Porsche couleur de Normandie, comme le temps…

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Un vaisseau déjà prêt pour revenir vers le futur d’Avignon !

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Illustrations 

Photos @ Gérard Gaud ( Maserati de route sous abri)
Photos @ Olivier Rogar

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