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La réception des frères Fittipaldi

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 Johnny Rives nous fait une belle surprise de début d’année avec ce billet unissant football et automobile.
A ses côtés nous présentons à nos lecteurs tous nos voeux pour cette nouvelle année ; Santé, paix et accomplissements pour vous et les vôtres !

Classic Courses

 C’était en 1971. Le Brésil s’éveillait au sport automobile sous l’impulsion d’Emerson et Wilson Fittipaldi. Avant de songer à organiser un grand prix de F1, les Brésiliens avaient organisé une série d’épreuves ouvertes aux F2, baptisée « Torneio de Formula Dos », dans laquelle les Fittipaldi affronteraient leurs habituels adversaires européens – Peterson, Gethin, Schenken, Pescarolo etc. La première des quatre courses aurait lieu sur le circuit d’Interlagos de Sao Paulo, un tracé spectaculaire et sélectif qui n’avait pas encore été émasculé comme il est devenu aujourd’hui.

 Pilotes et journalistes européens avaient répondu avec intérêt et curiosité à cette initiative brésilienne. Pour fêter l’évènement, les frères Fittipaldi avaient organisé un raout qui connut un joli succès auprès de la bourgeoisie pauliste, heureuse de venir côtoyer les pilotes avec lesquels les Fittipaldi se frottaient à Silverstone, Monza ou encore à Pau.

 Une dizaine de serveurs sillonnaient la foule, présentant des plateaux de boissons variées et autres amuse-gueule. Parmi les invités émergeait un personnage entouré d’attentions bienveillantes et suscitant un respect chez chacun : Pelé (les Brésiliens prononcent Pélê). Henri Pescarolo et Bob Wollek en compagnie desquels j’assistais à la réception furent ému de lui serrer la main quand Emerson Fittipaldi leur en fit la présentation. Il jouait encore dans le club de ses débuts, Santos, et jouissait bien sûr déjà de la renommée qui est restée la sienne jusqu’à nos jours.

 Au-delà de l’émotion, un élément finit par me sauter aux yeux. Bien plus qu’un simple détail. Dans cette réunion mondaine, Pelé était l’unique Noir à figurer parmi les invités. Les autres étaient serveurs.

                                                                                          Johnny Rives.

Pelé en tournée à Paris en 1971 : ICI

Notes :

1) La photo de une date de 1972, mais c’est la seule que nous avons trouvée avec les deux protagonistes principaux de ce billet.
2) 1971 a été la dernière année de sélection de Pelé avec l’équipe du Brésil.
3) Johnny ne le cite pas mais Jean-Pierre Jarier a aussi participé à cette tournée brésilienne de F2.


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Johnny Rives

« Lorsque j’ai été appelé sous les drapeaux, à 21 ans, j’avais déjà une petite expérience journalistique. Un an et demi plus tôt j’avais commencé à signer mes premiers « papiers » dans le quotidien varois « République », à Toulon. J’ai envoyé le dernier d’entre eux (paru le 4 janvier 1958) à Pierre About, rédacteur en chef à L’Equipe. Il m’a fait la grâce de me répondre après quoi nous avons correspondu tout au long de mes 28 mois d’armée. Quand je revins d’Algérie, très marqué psychologiquement, il voulut me rencontrer et me fixa rendez-vous au G.P. deMonaco 1960. Là il me demanda de prendre quelques notes sur la course pendant qu’il parlait au micro de Radio Monte-Carlo. J’ignorais que c’était mon examen d’entrée. Mais ce fut le cas et je fus reçu ! Je suis resté à L’Equipe pendant près de 38 ans. J’ai patienté jusqu’en 1978 avant de devenir envoyé spécial sur TOUS les Grands prix – mon premier avait été le G.P. de France 1964 (me semble-t-il bien). J’ai commencé à en suivre beaucoup à partir de 1972. Et tous, donc, dès aout 1978. Jusqu’à décembre 1996, quand les plus jeunes autour de moi m’ont fait comprendre qu’ils avaient hâte de prendre ma place. C’est la vie ! Je ne regrette rien, évidemment. J’ai eu des relations privilégiées avec des tas de gens fascinants. Essentiellement des pilotes. J’ai été extrêmement proche avec beaucoup d’entre eux, pour ne pas dire intime. J’ai même pu goûter au pilotage, qui était mon rêve d’enfance, ce qui m’a permis de m’assurer que j’étais plus à mon aise devant le clavier d’une machine à écrire qu’au volant d’une voiture de compétition ! Je suis conscient d’avoir eu une vie privilégiée, comme peu ont la chance d’en connaître. Ma chance ne m’a pas quitté, maintenant que je suis d’un âge avancé, puisque j’ai toujours le bonheur d’écrire sur ce qui fut ma passion professionnelle. Merci, entre autres, à Classic Courses. »

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Christophe Dejean

L’attaque est déterminante en course, en football, en écriture . L’attaque: c’est ce qu’on voit en premier, avant la vocation de la voiture d’Emmo qui échappe d’un geste doux au survirage, du ballon qui s’accélère en lenteur sous le tir du Roi, ou du  « c’était en 1971 » jeté par l’éclair d’une vie de passion qui arraisonne le lecteur.
Trois Rois qui ne laissent aucune chance à nos mémoire de fuir notre admiration.

eric bhat

L’attaque, oui. Mais quelle chute aussi ! « Les autres étaient serveurs. » Un vrai papier de société…

Pierre Ménard

Merci Johnny pour ce souvenir, qui a en outre le mérite de replacer les faits dans le contexte historique en ce qui concerne la piètre considération des classes nanties envers leurs congénères de couleur dès lors qu’ils ne tapaient pas avec succès dans un ballon rond.
Pour ce qui est d’Interlagos, je ne suis pas d’accord avec toi : je n’y suis évidemment jamais allé, mais la version moderne du circuit me paraît être une des meilleures reconversions de ces anciens tracés avec celle de Francorchamps, comparée aux horreurs opérées sur l’Österreichring, le nouveau Nürburgring, Kyalami et même Charade.

Johnny Rives

Non Pierre, c’est du même niveau, je t’assure.

Walter

Je suis Brésilien. Les paroles de Johnny Rives, le troisième Roi, c’est sur, sont emouvantes. c’est le registre  historique du sport automobile. Le Brésil venait d’ètre Champion du Monde Football au Méxique et le sport automobile deviendrait, dans les années suivantes, comme le sport du dimanche matin, au coeur des brésiliens et brésiliennes. Fittipaldi, Piquet, Senna, le drapeau vert et jaune se passait des mains de Pelé a celles de Fittipaldi et ses « créatures ». Merci a Classic Courses et a Johnny Rives de ce souvenir génial. Il s’agisait d’un temps ou les noirs étaient exclus de la vie sociale et… Lire la suite »

richard JEGO

Toujours rien pour rendre hommage à Philippe Streiff , pilote de F1 ??

richard JEGO

Et tétraplégique suite à son accident au GP du Brésil , à RIO à l’époque .

Olivier Rogar

Richard Jego, nous ne sommes que des hommes. Le décès de Patrick Tambay dont nous étions proches ici à la rédaction, (Johnny Rives, Pierre Ménard, Moi-même) nous a beaucoup affecté. Mais nous avons été présents, il aurait été pour moi inconcevable de ne pas l’être. Maintenant Philippe Streiff qui était un ami proche de Classic Courses. Nous avons produit plusieurs articles à son sujet. Dont une longue interview. Pour y accéder il vous suffit de taper « Philippe Streiff » dans le cartouche de recherche, sous le titre du site. Cliquer ici : https://www.classiccourses.fr/magazine/philippe-streiff-parlez-nous-de-la-33-13/ Mais j’avoue ne pas avoir eu la force… Lire la suite »

Christophe Dejean

Et puisque ce n’est pas parce que la vie n’est pas élégante qu’il faut se comporter comme elle, il n’y aura pas que des souvenirs sombres à Interlagos. La victoire de El Lole pour son premier grand prix -même hors championnat -qui défie les lois de la physique avec sa courte Brabham après l’abandon d’Emerson,le rêve bleu en 1979 de Jacques et Patrick et le premier double gauche enfin vaincu sans lever, et surtout dans mon âme d’enfant en 1975 Jean-Pierre Jarier en survirage noir sublimé par Manou Zurini et couronné par la plume réparatrice, un prodige devant une telle… Lire la suite »