John Watson s’apprète à effectuer plusieurs saisons dans des top teams de F1. Il sera 3e du championnat en 1982, ex-aequo avec Pironi, remportera 5 victoires et la réputation d’être un combattant hors paire quand il était dans les conditions les plus difficiles.
Olivier Rogar
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Penske, l’équipe US, première victoire
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OR-CC : C’est comme cela que Penske vous repère ?
John Watson : Je pense que c’est la raison pour laquelle j’intéressais certaines personnes chez Penske, principalement le manager de l’équipe Heinz Hoffer, qui m’avait observé. Nous avons eu des discussions pour 1976. Ils voulaient connaître mes projets. Ils auraient peut-être une opportunité pour moi. Parce que je crois qu’à la fin de 1975, Mark Donohue aurait de toute façon pris sa retraite de la Formule 1. Penske gardait donc un œil sur les pilotes qui pourraient s’intégrer à leur équipe.
OR-CC : Je crois que Mark Donohue était déjà censé arrêter de courir en Formule 1 au début de 1975, mais il a piloté, malheureusement.
John Watson : Je ne sais pas grand-chose de ce que Mark prévoyait, mais je ne pense pas qu’il était totalement à l’aise en Formule 1 en dehors de l’Amérique du Nord.Il a couru de manière très compétitive au début des années 70, quand il faisait une ou deux courses, à Watkins Glen ou au Grand Prix du Canada, des circuits qu’il connaissait bien et auxquels il pouvait apporter beaucoup de contribution. Mais aller sur des circuits européens, sur lesquels il n’avait jamais couru, et avec une voiture qu’il développait, c’était beaucoup plus difficile. Peut-être qu’il n’aimait pas vraiment vivre en Europe. Je crois qu’il aimait vivre en Amérique et qu’il voyait son avenir au sein de l’empire de Roger Penske là où l’équipe Penske était basée.
OR-CC : Et donc, en 1976, vous passez vraiment chez Penske.
John Watson : Penske avait des sponsors très, très en vue. Ils possédaient une voiture qui avait été conçue par un homme qui travaillait chez Brabham, un homme qui s’appelait Geoff Ferris, et tout m’a semblé être en phase. Le bon moment et le bon endroit pour moi afin de poursuivre ma carrière en F1.
OR-CC : Comment était la voiture ?
John Watson : À la fin de 1975, des changements de réglementation, en particulier autour de l’aileron arrière et de la boîte à air, ainsi que d’autres modifications techniques, signifiaient que la voiture pour 1976, au début, n’était pas aussi bonne qu’elle l’avait été à la fin de 1975.
Et la Penske PC3, qui était la voiture avec laquelle nous avons commencé en 1976, n’était pas une voiture aussi agréable à conduire qu’elle l’avait été à la fin de 1975.
Alors Roger a alors dit à Geoff Ferris, fais-moi une nouvelle voiture, et la voiture est alors devenue la Penske PC4. Et au départ, quand cette voiture roulait, il y avait des zones où elle n’était pas aussi rapide qu’elle aurait dû l’être, mais au Grand Prix de France au Paul Ricard, un certain nombre de changements avaient été initiés, et la voiture est devenue beaucoup, beaucoup plus compétitive. Et c’est la voiture que j’ai pilotée jusqu’à la fin de 1976.

OR-CC : Vous avez gagné votre premier grand prix en Autriche et à la suite d’un pari, vous vous êtes rasé la barbe !
John Watson : J’ai dit à Roger, si on gagne un Grand Prix, je te promets que je vais me raser la barbe, ce que j’ai fait. Ce soir-là, je suis rentré à mon hôtel. Je suis rentré à Londres, j’ai séjourné dans un hôtel à l’aéroport de Londres, je suis allé dans ma chambre, j’ai tout rasé.
Même Roger ne s’attendait pas à ce que je le fasse si rapidement. Et il ne m’a pas reconnu ! Parce qu’il ne m’avait connu qu’avec une barbe.
La seule chose qu’il a reconnue, c’est ma voix !
OR-CC : J’étais au Grand Prix de France en 1976 . Vous avez fini sur le podium derrière James Hunt et Patrick Depailler.
John Watson : Rappelez-vous aussi, il s’agissait d’une entrée d’une seule voiture. Alors qu’en 1976, toutes les équipes d’usine étaient engagées avec deux voitures. [ Sauf Ligier et Jacques Laffite]
OR-CC : La voiture était assez belle. Et l’on dit qu’une belle voiture est souvent une bonne voiture, n’est-ce pas ? .
Je suis d’accord. Si une voiture a l’air bien, normalement, normalement, c’est bien. Et c’était le cas de la Penske.
En étant une équipe américaine, ils ont compris mieux que les équipes européennes l’importance de l’aspect visuel d’une voiture de Formule 1 et d’une équipe de Formule 1, parce que si vous voulez avoir un parrainage, alors vous devez présenter votre équipe, votre voiture, d’une manière qui se démarque, elle doit être plus belle que n’importe quelle autre.
Il y avait Gold Leaf Team Lotus, Marlboro-McLaren, Brabham n’avait pas de parrainage, vraiment, jusqu’à Martini. Et l’apparence de la Penske, ses couleurs, le rouge, le blanc et le bleu, étaient vraiment très puissantes. Des couleurs très photographiques.

OR-CC : Mais pourquoi se sont-ils arrêtés à la fin de 1976 ?
John Watson : La raison pour laquelle Roger a arrêté, c’est parce qu’il courait dans d’autres séries en Amérique du Nord, Indy Car, NASCAR, je ne sais pas quoi d’autre, mais vraiment, la plus grande raison était parce qu’il était dans la construction de l’empire commercial « Roger Penske ».
Et le problème avec la F1, c’est qu’à ce moment-là, la plupart des courses se déroulaient dans cette partie du monde, en Europe, en Afrique du Sud, en Amérique du Sud et en Amérique du Nord [ où il y avait trois grands prix à partir de 1976, Long Beach, Watkins Glen aux USA et Mosport au Canada ]. Il faisait des allers-retours vers l’Amérique pour ses affaires, essayait de développer son entreprise, d’organiser d’autres événements, de sorte que c’est devenu trop, je pense.
Mais deuxièmement, pour Penske, le fait de se lancer dans l’exploitation de deux voitures allait nécessiter plus d’implication individuelle. Et je pense que Roger a peut-être senti qu’une fois qu’il s’engagerai dans cette voie, il ne pourrait pas être aussi présent que nécessaire. Tyrrell était dans son usine tous les jours, Chapman dans son usine tous les jours, Bernie était là. Donc, ces gens qui dirigeaient les équipes, qui étaient les meilleures équipes, étaient des gens dont le seul intérêt était de diriger une équipe de Formule 1.
Roger avait tellement d’autres centres d’intérêt localisés en Amérique du Nord qu’il n’avait pas d’autre choix que de leur donner la priorité sur la F1. C’était très décevant, très triste pour moi mais je comprenais la situation, il devait le faire – Comme on dit en anglais, il fallait être pragmatique !.
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Brabham, fiabilité désastreuse en 1977, avec Niki en 1978
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OR-CC : Vous avez alors rejoint Brabham. C’était la première fois que vous rouliez avec un coéquipier ?
John Watson : Oui, c’était un très grand moment parce que tout au long de ma vie de pilote, certainement en F1, à l’exception de la course au Nürburgring où Ronnie Peterson était mon coéquipier, je n’avais jamais été que dans une équipe d’une seule voiture. Désormais j’entrais chez Brabham, une équipe de deux voitures, et j’allais avoir un coéquipier qui était Carlos Pace.
Carlos était un très bon gars, un pilote très rapide, et il était un élément très important de l’équipe Brabham à cette époque. Donc, j’avais désormais un bon coéquipier, un coéquipier sérieux avec lequel rivaliser. Malheureusement, Carlos, après le Grand Prix d’Afrique du Sud, a été victime d’un accident d’avion au Brésil du fait d’une tempête. Bernie était un très bon ami de Carlos Pace, et il était extrêmement bouleversé quand nous avons appris cette nouvelle.

OR-CC : On le serait à moins. Stuck est alors entré dans l’équipe pour le reste de l’année 1977. Il semble que vous ayez eu beaucoup de problèmes avec la voiture.
John Watson : Des choses stupides, stupides. Au Grand Prix de France à Dijon, je suis tombé en panne d’essence [ Dans le dernier tour, à 800 m de l’arrivée, ce qui offrit la victoire à Mario Andretti ] .
Au Grand Prix de Grande-Bretagne à Silverstone, un autre problème de carburant. J’aurais certainement gagné Dijon, et j’étais en tête à Silverstone, quand encore une fois, un autre problème de carburant s’est produit. Il y avait donc au minimum deux courses que j’aurais dû gagner cette année-là.
Et sans doute, j’aurais pu en gagner plus, mais pour des raisons de fiabilité ou pour d’autres raisons, cela ne s’est pas produit. [ 17 départs, 1 pole, 5 fois en première ligne, 12 abandons, 3 fois dans les points ]
OR-CC : Mais vous êtes resté et en 1978, vous avez eu Niki Lauda comme coéquipier.
John Watson : A Hockenheim en 1977, Bernie m’a dit, « Que penses-tu de l’arrivée de Niki dans l’équipe pour 1978 ? » Et j’ai dit « Bernie, écoute, je n’ai aucun problème avec Niki ou qui que ce soit d’autre. Tout ce que je te demande, c’est que tu me garantisses un traitement égal, une préparation, que vous ne ferez pas de Lauda le numéro un et de moi le numéro deux ». Alors Bernie a dit : « Oui, pas de problème, pas de problème ».
Mais la réalité était que Niki, en 1977, avait un parrainage personnel avec une société appelée Parmalat. Et pour 1978, Niki a présenté Parmalat à Bernie, puis Parmalat est devenu le sponsor officiel de Brabham. Donc Niki avait un lien personnel avec Parmalat qui apportait de l’argent à l’équipe, je ne sais pas combien…

Ce que je n’avais jamais réalisé, c’est à quel point un autre pilote peut être puissant lorsqu’il a ce genre de soutien financier.
Et rappelez-vous, Niki venait de remporter son deuxième championnat du monde. Niki était donc à l’époque considéré comme, si ce n’est le meilleur, l’un des meilleurs pilotes de Formule 1. Et il avait beaucoup de compétences, notamment des compétences politiques… Mais moi je n’avais pas ce genre de compétence.
Il savait comment faire basculer une équipe de son côté du garage. Je me souviens, il m’a dit ça, oui, textuellement. Et si vous repensez à 1977, quand Ferrari a signé Carlos Reutemann, et que Niki était vraiment, vraiment en colère, parce que Ferrari a fait de Reutemann le pilote numéro un, alors Niki a manœuvré pour essayer de détruire Reutemann dans l’équipe. Et je pense qu’il l’a probablement fait. Carlos était un gars très rapide, mais il n’avait pas la capacité mentale et la force que Niki avait.
Ou du moins, ce n’était même pas la force, c’était quelque chose qui va fondamentalement plus profondément dans les êtres humains. Il y a des gens qui sont faits différemment des autres, et Niki était fait différemment de la plupart des pilotes de Grand Prix que j’ai connus.
Ce qu’il a fait après son crash pour redevenir champion du monde est au-delà de ce que les hommes peuvent faire en général, vous ne croyez pas ?
John Watson : Je pense avoir dit à de très nombreuses reprises que ce que Niki a fait quand il est revenu à Monza en 1976 est la chose la plus courageuse que j’ai jamais vue faire à un sportif, pas seulement un pilote de F1. Parce qu’après avoir vécu son expérience de l’accident, des brûlures, il a failli mourir, puis cinq ou six semaines plus tard, il est revenu à Monza en terminant quatrième. Je pense que c’était une illustration exceptionnelle de son caractère, de sa force émotionnelle et physique, de sa détermination exceptionnelle. Ce qu’il a fait est absolument exceptionnel. Je suis d’accord avec vous.
Je vous le dis, quand vous regardez les pilotes de Formule 1 que nous avons aujourd’hui, il n’y en a pas un seul assez fort pour tenir la comparaison avec Niki Lauda pour ce que Niki a fait en 1976.

OR-CC : En 1978, vous avez piloté avec Niki Lauda comme coéquipier et vous vous en êtes très bien sorti. Et puis vous êtes parti chez McLaren.
John Watson : J’ai senti que l’effort qui a été consenti pour ma voiture et moi n’était pas au niveau de ce que Bernie avait dit. Simplement parce que Niki a fait ce que Niki a toujours fait.
Il a su tourner l’équipe en sa faveur. Parce que Niki n’était pas intéressé par un coéquipier. Il ne s’intéressait qu’à lui-même. Oui. Et Niki était très intelligent et réalisait ce qu’il voulait accomplir. Je n’avais jamais connu ce genre de coéquipier.
Le premier coéquipier que j’ai eu était Carlos. Pas politique. Patrick Tambay. Pas politique. Franz Stuck. Pas politique. Niki, 100 % machiavélique. Vous savez qui est Machiavel ? [Yes, Le Prince ] Et bien, Niki était machiavélique ! Donc, quand vous découvrez cela, il est très difficile de réagir. La seule façon de protéger votre position est de le battre. Mais si tout est changé en sa faveur, il est très difficile de battre quelqu’un qui a toutes les compétences que Niki avait, ainsi que tous les autres avantages dont il bénéficiait. Oui, son poste, son parrainage, etc.
Et aussi parce que, comme Bernie me l’a dit : « Regarde, il a amené le sponsor. Il a apporté l’argent à l’équipe ». Bien sûr, ça a fait effet de levier et Bernie et Niki sont devenus des amis très proches. Et, vous savez, chacun aimait l’autre. Et ils sont restés des amis proches tout au long de la vie, jusqu’à la mort de Niki.

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Chez McLaren, plus fort que Lauda et un titre raté de très peu
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OR-CC : Mais dites-moi, bien qu’il ait été machiavélique en 1982 et 1983, vous avez fait mieux que lui.
John Watson : D’accord. En 1982, lorsqu’il est arrivé chez McLaren, il y avait une situation légèrement différente… Quel est le mot que je veux utiliser pour me faire comprendre ? Philosophie. Oui. La philosophie était fondamentalement différente : McLaren, l’équipe, est la plus importante. Les pilotes ne sont pas les plus importants. Et finalement, Niki s’est rendu compte qu’il ne pouvait avoir autant d’influence.

En fin de compte, il était pilote pour McLaren. Il n’allait pas être l’élément dominant au sein de l’équipe McLaren. Et je pense qu’avec la façon dont la direction de McLaren fonctionnait à cette époque, Niki ne pouvait pas avoir la même puissance qu’il avait quand il était chez Brabham ou quand il était chez Ferrari. Et il n’aimait pas ça. Il n’aimait pas ça. Tout ce qui intéressait Ron Dennis et John Barnard, c’était la victoire de l’équipe McLaren.
OR-CC : Et les choses se passant davantage sur la piste, vous avez pu vous exprimer totalement.
John Watson : En 1982, j’ai pu posséder une voiture que j’aimais conduire. Et Niki avait sa voiture qu’il aimait conduire. Nous étions donc tous les deux un peu différents l’un de l’autre. Je pense que j’étais un très bon pilote de course. Je pense que mes compétences en tant que pilote de course étaient à bien des égards, meilleures que celles de Niki en tant que pilote de course. Il y a d’autres domaines en F1 où Niki était meilleur que moi. Il était très, très bon dans les réglages de la voiture, très bon pour obtenir quelque chose qui fonctionnait pour lui.

Mais pour moi, il n’était pas aussi bon pilote que moi. Et il y a des preuves pour étayer ce que je dis parce que je l’ai rattrapé et dépassé dans de nombreuses courses. Grand Prix de Belgique, à Détroit, à Las Vegas, la dernière course, et dans d’autres courses. La meilleure force de Niki dans une course était de pouvoir mener la course. Mais venir du milieu du peloton et se battre pour avancer n’était pas sa meilleure force. Il était bon, mais pas aussi bon que moi. Je dépassais plus de voitures et mieux que lui.
OR-CC : Vous l’avez montré lorsque vous avez remporté le Grand Prix des USA en partant de la 22e position en 1983.
John Watson : En 1983, Niki s’est rendu compte que nous devions avoir notre moteur turbo le plus rapidement possible. Donc, en réalité, en 1983, je ne pense pas qu’il ait vraiment fourni un grand effort. Car « à quoi bon ? » « Je ne peux pas battre une voiture turbo », je dirais. « Il est impossible de battre une voiture turbo. Alors, quel est l’intérêt ? » C’était donc la logique de Niki.

C’est ainsi qu’il pensait. Et il ne s’intéressait qu’à l’intégration du moteur turbo dans une F1 le plus rapidement possible. Donc il courait, oui, et il courait bien, mais il a en quelque sorte abandonné le défi pour le championnat. Il considérait que 1983 n’était pas une occasion sérieuse de remporter le championnat du monde. Finir 5e ou 6e du championnat ? À quoi bon? À quoi bon?
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Après Lauda, Prost !
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OR-CC : Et pour ce qui est du machiavélisme, vous aviez un autre coéquipier qui était Alain Prost. Était-il le même que Niki ?
John Watson : Non, non, je veux dire, Alain est arrivé chez McLaren directement de la Formule 3. Et tout de suite, il est devenu évident qu’Alain avait un talent très particulier. Donc, certainement en 1980, il a fait du très bon travail. Et il a pu travailler avec les ingénieurs et a obtenu de meilleures performances à ce moment-là que moi. Oui. Mais le problème à l’époque, c’est que la McLaren n’était pas compétitive par rapport à Williams, à Brabham, à Ligier, à qui que ce soit.
Et l’équipe a commencé à penser que le problème n’était pas avec la voiture, mais avec moi. Parce qu’Alain faisait un meilleur travail. Mais la réalité était différente. Oui, Alain a effectué un travail fantastique, mais je l’ai découvert à la fin de 1980, lorsque John Barnard est venu aux deux derniers grands prix, et il a apporté des modifications à ma voiture, ce qui l’a totalement transformée. Et McLaren a fabriqué une nouvelle voiture à la fin de 1980 appelée la M30. Donc Alain était dans la M30 et reculait, et moi dans la M29, tout d’un coup, j’étais devant. Et au Canada et à Watkins Glen, j’étais beaucoup plus rapide qu’Alain.
Cela m’a donc montré que je n’étais pas si mauvais après tout. Mieux que ce que l’équipe me disait, ou que les médias, la presse, qui disaient que j’étais fini. Peu importe. Et ces deux dernières courses ont juste changé la voiture, nuit et jour, nuit et jour. Je pense que c’est bon pour la motivation. C’est bien si vous terminez l’année en force. C’est beaucoup mieux que de mal finir.
Mais juste à ce moment-là, à l’approche de la fin de l’année, Renault poursuivait Alain pour qu’il signe pour piloter pour eux en 1981. Et je pense qu’Alain n’avait peut-être pas vu une partie du potentiel de McLaren [ Reprise par Ron Dennis ]. Et encore une fois parce que Renault, l’équipe d’usine, l’équipe française, les moteurs turbocompressés, les pneus Michelin, c’était un changement de carrière qu’Alain n’avait presque pas d’autre choix que de faire. Il avait besoin de déménager et de se retrouver dans une équipe d’usine comme Renault, et de commencer à gagner des courses et peut-être de gagner un championnat du monde.

OR-CC : Mais il n’a remporté aucun championnat avec Renault.
John Watson : Non, il ne l’a pas fait, pour de nombreuses raisons. Et puis fin 1983, en Afrique du Sud, la bataille s’est jouée entre Alain et Piquet. Et rappelez-vous, Brabham faisait fonctionner l’essence dans le moteur de la BMW, dont on disait qu’elle était, en français, potentiellement « cancérigène ».
Et Renault a eu un problème, je ne sais pas quel était le problème en course, mais Alain n’a pas terminé et Piquet a remporté son deuxième championnat du monde. Ce championnat de droit aurait dû être le championnat d’Alain et le samedi soir, la course avait lieu samedi en Afrique du Sud, on est rentré en Angleterre. Sur le chemin du retour, les gens de Marlboro – McLaren m’ont dit, « Oh, je suppose que nous allons devoir parler du contrat pour l’année prochaine ». J’ai proposé : «Oui, faisons-le maintenant ». Et ils m’ont répondu qu’ils allaient revenir vers moi.
Alain rentre à Paris le dimanche, et est immédiatement convoqué à la Régie. Le siège de Renault à Paris. Là on lui dit : « Vous êtes viré »… Il y a des raisons, sans doute, qui n’ont jamais été exprimées publiquement, mais je ne sais pas lesquelles. Et Alain se retrouve, dimanche soir, sans volant en F1. Il a immédiatement contacté John Hogan chez Marlboro pour lui dire : « John, j’ai été viré, as-tu une place pour moi chez Ferrari pour 1984 ? » Et Hogan a dit : « Non, les sièges Ferrari sont confirmés, mais nous avons un siège disponible chez McLaren ». Et Alain a dit : « Mais vous avez John et Niki ». Et Hogan de lui répondre : « Niki est sous contrat, John ne l’est pas, parlons de la possibilité que vous conduisiez pour nous en 1984 et au-delà »
Et c’est tout simplement comme ça que ça s’est passé. Je n’ai jamais eu de discussions avec McLaren ou Marlboro à part simplement dire que nous devions en parler. C’était donc une situation qui s’est produite. Et c’est arrivé parce que Renault a choisi de licencier Alain pour une raison quelconque. Mais je n’en suis pas sûr. Mais quoi qu’il en soit, c’est arrivé. Si Alain avait remporté le championnat du monde, je ne sais pas s’ils l’auraient viré ou non. Je ne sais pas non plus.
A suivre…
Les statistiques de John Watson en F1 : Site Stat F1