Quelques années ont passé et le petit garçon est devenu adolescent. Son grand cousin de Paris vient désormais dans le Lot au volant d’une voiture allemande. Une marque qu’on n’a encore jamais vue entre Cahors, Figeac et Saint-Céré.

 

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Au tout début des années soixante dix, les BMW ne sont pas légion sur les routes de France et seuls les connaisseurs en possèdent. Ayant enfin appris ce que représentait la marque bavaroise, l’adolescent lotois n’est pas peu fier de son cousin qui descend dans le Quercy avec cette auto vitaminée dont il règle le ralenti le dimanche matin dans le sous-sol de la maison. Pour venir de Paris, il lui arrive de faire le détour par Clermont Ferrand, le col du Lioran et Aurillac : les routes du Massif central, c’est autrement plus rigolo que la trop rectiligne N20 !…

 

2 Coupes du Salon 1971 André Lenoir.jpgLe cousin n’est pas un professionnel du volant. C’est un passionné doué qui consacre ses semaines à son entreprise de maçonnerie et ses week-ends à limer les dalles de l’anneau de Montlhéry. Au début des années soixante, il s’est payé une Floride Renault, comme tous les jeunes Français persuadés détenir là LA voiture de sport par excellence. Ayant vite compris son erreur, il jeta aux orties son patriotisme de circonstance et achèta une Austin Healey Sprite, avant que de passer à l’échelon supérieur avec la MG B. C’est avec elle qu’il fera ses débuts à l’école de pilotage de l’AGACI. Avec un moteur retravaillé par Huron, la MG « envoie » bien et le cousin va aller jusqu’à courir avec, sans arceau de sécurité : « De la vraie folie » !

 

 

D’élève, il devient moniteur en 1970. Sa rapidité dans la cuvette du Gendarme et sa victoire dans une course de régularité de l’AGACI ont impressionné le directeur Roger Carmillet qui lui offre ce poste d’instructeur. « En fait, j’ai vraiment compris comment négocier au mieux le Gendarme quand j’ai vu Brian Redman le faire lors des 1000 km. Il n’y avait pas de tribunes. On avait amené des planches et des tréteaux avec des copains et on regardait ainsi perché les voitures passer ». La compétition coûte cher et les cent francs (plus le plein d’essence) alors octroyés par l’AGACI aident à être plus à l’aise quand on passe à la caisse de la petite épicerie du quartier.

Pour les cours, il utilise les voitures dont dispose le circuit : R8 Gordini, NSU TT, Triumph TR3 & 4, Opel GT (« Une vraie vacherie »). Tous ses dimanches se passent ainsi sur le plateau de Sainte Eutrope, à corriger les défauts des uns et des autres, et à parfois serrer les fesses à l’approche trop enthousiaste d’un virage par un élève ayant freiné au panneau « trop tard » : « Les pires : les moniteurs d’auto-école ! Un jour, j’ai dit à l’un d’eux particulièrement mauvais : si vous apprenez à conduire comme ça à vos élèves, le nombre d’accidents en France ne m’étonne plus ».

 

Quelque temps auparavant, la MG a laissé la place à une BMW 2002 Ti, que le petit cousin du Lot avait initialement jugée moins attirante que le roadster britannique. Mais les performances sont en augmentation, même s’il faut procéder à quelques aménagements. Par souci financier et amour du travail bien fait, le nouveau moniteur usine lui-même des écopes de freins avant surdimensionnées et des ailettes métalliques rivetées sur les jantes alu pour un refroidissement optimisé (« parce que le freinage d’une Béhème de l’époque, hein !… »). La taille des roues augmente ainsi que celle des ailes. Il s’alignera alors dans les courses sur le « 3,3 » ou le « routier » lors des diverses Coupes organisées. Pour le plaisir et uniquement à Montlhéry : pas le temps d’aller courir ailleurs, il y a l’entreprise à faire vivre. Surtout avec le choc pétrolier et ses conséquences économiques terribles qui vont changer la donne. Le temps se couvre salement pour les purs amateurs et le cousin de Paris devra dire adieu à l’AGACI au milieu des années soixante-dix.

 

Le casque, les gants et la combinaison sont définitivement remisés au fond d’un placard. Seules, quelques photos rappellent combien il était bon de piloter en ce temps-là. Le petit cousin du Lot, lui, garde en mémoire ces ballades à belle allure sur les routes du Quercy ou de l’Aveyron dans cette Béhème qui poussait décidément beaucoup plus fort que la MG. Et qui surtout, tenait mieux la route ! Son grand cousin dispensa au passage quelques conseils au papa qui avait laissé tombé les 404 au profit d’une Audi 100 GL plus intéressante. Assis derrière, le petit cousin n’en perdra pas une miette…

 

Pierre Ménard

 

 * : publié en 2009 sur le site Mémoire de stands

3 Coupes de l'ACIF 1971.jpg 

Légendes photos :

1- Coupes de l’A.C.I.F. Montlhéry 1971, André Lenoir BMW n°4 © D.R.

2- Coupes du Salon Montlhéry 1971, André Lenoir © D.R.

3- Coupes de l’A.C.I.F. Montlhéry 1971, André Lenoir BMW n°4 © D.R.

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